"Attention, nous sommes à vos trousses" : Un rapport de RSF sur la répression transnationale sans précédent des journalistes iraniens au Royaume-Uni
Trois semaines après qu'un journaliste iranien a été poignardé dans une rue de Londres par des inconnus, Reporters sans frontières (RSF) publie un rapport sur la montée des menaces transnationales contre les journalistes iraniens travaillant au Royaume-Uni. Nous demandons à l'Iran de cesser toutes ces attaques contre la presse, et au gouvernement britannique de prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les journalistes puissent travailler librement et sans crainte.
"Ce rapport, qui fait état d'une menace effrayante et de grande ampleur pour les libertés fondamentales, devrait servir de signal d'alarme pour les autorités britanniques et les démocraties du monde entier. Les journalistes iraniens en exil font preuve d'un courage et d'une résilience remarquables en continuant à travailler face à de telles menaces, mais il faut faire beaucoup plus pour les soutenir et les protéger. L'Iran doit cesser de cibler les journalistes et, au Royaume-Uni, le gouvernement, les forces de l'ordre, les plateformes de médias sociaux et les employeurs doivent collaborer et tout mettre en œuvre afin que tous les journalistes puissent faire leur travail sans entrave.
Watch Out Because We're Coming For You: Transnational Repression of Iranian Journalists in the UK
Depuis des décennies, la répression brutale du journalisme indépendant en Iran s'accompagne d'un ciblage systématique des journalistes qui couvrent l'Iran depuis l'étranger, dans le but de les réduire au silence. Les journalistes iraniens travaillant dans des pays aussi éloignés que les États-Unis, la France, l'Allemagne, la Suède ou le Royaume-Uni, font souvent l'objet d'intimidations ou d'attaques, à la fois en ligne et hors ligne.
Londres, où se trouvent des chaînes importantes de télévision en langue persane, est un point chaud pour ces attaques en raison du grand nombre de journalistes iraniens qui y sont basés. Ce rapport de RSF, basé sur des témoignages recueillis en 2023 auprès de dizaines de journalistes iraniens qui travaillent au Royaume-Uni, montre que le niveau de menace transnationale pesant sur les journalistes iraniens est sans précédent et qu'il a un coût professionnel et personnel incommensurable.
Il révèle également que, bien qu'ils travaillent dans un pays qui prétend défendre la liberté de la presse, l'impact de la répression transnationale sur les journalistes iraniens au Royaume-Uni n'a pas été pris en compte de manière adéquate par le gouvernement, les forces de l'ordre ou les plateformes de médias sociaux. Cela, en partie parce que leur situation a eu tendance à être considérée comme une priorité qui concerne l’étranger, et non comme une priorité nationale.
Le rapport s'appuie sur une enquête menée auprès de journalistes travaillant dans divers médias, notamment BBC News Persian, Iran International et Manoto, et sur plus de vingt entretiens approfondis avec des journalistes et des employeurs.
Les huit principales conclusions du rapport sont :
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Les attaques en ligne ont augmenté de façon exponentielle
Près de 90 % des journalistes interrogés ont déclaré avoir fait l'objet de menaces ou de harcèlement en ligne au cours des cinq dernières années, et 50 % d'entre eux ont indiqué qu'ils en recevaient fréquemment. Il s'agit notamment de menaces de mort et de viol, de tentatives d'hameçonnage, d'usurpation d'identité et de cyberattaques.
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De nombreuses attaques visent particulièrement les femmes
Les femmes sont fréquemment victimes d'abus en ligne, avec des messages sexualisés, misogynes ou diffamatoires. Les femmes interrogées dans le cadre de l'enquête ont déclaré qu'elles-mêmes ou des membres de leur famille avaient reçu des images explicites, qu’elles faisaient l'objet de campagnes visant à ternir leur réputation et qu’elles avaient reçu des menaces de viol et de mort explicites, parfois même quotidiennement.
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Le harcèlement des membres de la famille toujours en Iran se poursuit
Environ 60 % des personnes interrogées par RSF ont déclaré que leur famille avait fait l'objet de menaces ou d'intimidations liées à leur travail de journaliste. Il s'agit notamment de convocations à des interrogatoires, de sanctions économiques telles que le gel des avoirs ou la perte d'emploi, le retrait de passeport, l'interdiction de voyager, la surveillance, l'écoute téléphonique et les détentions.
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L'impact sur les journalistes, et sur le journalisme, est dévastateur
L'exposition prolongée aux menaces et aux abus, en ligne et hors ligne, entraîne de l'anxiété, des pensées suicidaires, de l'hypervigilance, des perturbations dans la vie familiale, de l'épuisement, une incapacité à dormir et de l'isolement. Les trois quarts des personnes interrogées dans le cadre de l'enquête ont déclaré avoir subi un stress psychologique, de l'anxiété ou un sentiment de vulnérabilité à la suite de menaces et de harcèlement. Les journalistes signalent qu'ils s'autocensurent, qu'ils doivent s'absenter de leur travail, qu'ils quittent les plateformes de médias sociaux, ou même, parfois, qu'ils quittent leur travail.
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La menace provient de multiples acteurs
Le gouvernement iranien et ses mandataires sont la principale source de menaces et de harcèlement, mais pas la seule. Au cours des dix dernières années, les groupes d'opposition, les militants politiques et d'autres membres de la diaspora iranienne ont également multiplié les actes de harcèlement en accusant les journalistes d'être favorables au régime. Pour les journalistes victimes de tels abus, il semble que l'hostilité vienne de tous les côtés.
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La réaction des plateformes de médias sociaux a été inadéquate
L'expérience des journalistes en matière de dénonciation des abus en ligne est très largement négative. De nombreuses personnes interrogées ont déclaré que les plaintes déposées auprès des plateformes de médias sociaux étaient soit ignorées, soit traitées de manière insatisfaisante.
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La réaction de la police britannique a été variable
Les grandes organisations ont déclaré qu'elles étaient bien soutenues par la police, notamment par la formation de leur personnel. Toutefois, au niveau individuel, de nombreux journalistes ont fait état d'expériences négatives lorsqu'ils ont signalé des attaques à la police, qui ne comprenait pas le contexte ou la gravité des menaces auxquelles ils étaient confrontés. L'absence de suivi ou de poursuites a entraîné une perte de confiance: seulement 13 % des personnes interrogées ont déclaré avoir signalé des abus à la police au cours des cinq dernières années, nombre d'entre elles estimant que ce serait une perte de temps.
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Le gouvernement doit faire plus
RSF demande au gouvernement britannique : d'inclure la répression transnationale des journalistes dans le Plan d'action national pour la sécurité des journalistes ; de fournir des mécanismes de protection de réponse rapide pour les journalistes confrontés à de graves menaces ; de tenir les plateformes de médias sociaux responsables de la gestion de la violence en ligne contre les journalistes ; et de travailler avec les organismes d'application de la loi pour s'assurer que les crimes transnationaux contre les journalistes sous la juridiction du Royaume-Uni fassent systématiquement l'objet d'enquêtes et de poursuites. Le Royaume-Uni devrait également établir des voies légales claires permettant aux journalistes contraints de fuir leur pays d'origine d'entrer au Royaume-Uni.
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