Une proposition de loi favorable à la neutralité de l’Internet et encadrant le filtrage
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La proposition de loi du député Christian Paul (PS), relative à la neutralité du Net, sera soumise au vote de l’Assemblée nationale le 1er mars 2011. Ce dernier appelle “à faire de la neutralité du Net le principe, et non l'exception”. Il affirme dans la loi "l'interdiction de discriminations liées aux contenus, aux émetteurs ou aux destinataires des échanges numériques de données".
Reporters sans frontières apporte son soutien à cette proposition de loi qui place le principe de neutralité au cœur de la conception du Net en lui donnant une consécration juridique.
Cette proposition rendrait par ailleurs obligatoire le contrôle du juge dans le cadre de mise en place de procédures de filtrage d’Internet, une disposition essentielle pour limiter les abus du filtrage. A ce jour, la Loppsi 2, qui est actuellement examinée par le Conseil constitutionnel, instaure un filtrage administratif du web au nom de la lutte contre la pédopornographie et propose qu’une liste des sites bloqués soit tenue par une autorité administrative, sans décision judiciaire. La proposition de Christian Paul donne également compétence à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) pour prendre le relais sur la mise en œuvre détaillée du principe de neutralité du Net.
Elle a cependant peu de chances d’être adoptée, notamment en raison de l’opposition du gouvernement. Ses auteurs ont pourtant organisé une consultation publique à son sujet et ont adapté leur proposition pour tenir compte des avis d’experts d’Internet ou du public, directement concerné.
L’organisation a par ailleurs noté avec intérêt le rapport d’étape de la mission sur la neutralité des réseaux et Internet, présenté par les députées Laure de la Raudière (UMP) et Corinne Erhel (PS) le 26 janvier. Comme la proposition de Christian Paul, ce rapport envisage un encadrement judiciaire strict des atteintes à la neutralité du Net. Reporters sans frontières se félicite que de telles initiatives soient prises dans un contexte tendant plutôt à la restrictions des libertés sur Internet.
L’organisation met cependant en garde contre le concept de classes de services mis en avant dans ce rapport, ainsi que par le ministre de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie numérique, Eric Besson, dans son discours à l’occasion des 2e rencontres parlementaires sur l’économie numérique, le 8 février 2011. S’il était intégré au système législatif, ce concept risquerait d’aboutir à une régulation partielle sur la neutralité du net.
Grâce à des mécanismes de différenciation des flux selon leur degré de priorité, les opérateurs seraient autorisés à hiérarchiser les demandes des internautes. Le rapport garantit certes une qualité de service minimum, mais laisse ensuite une grande marge de manœuvre aux acteurs privés. Introduisant de dangereuses inégalités dans l’utilisation du Net, un opérateur aurait la possibilité de privilégier un client par rapport à un autre, en donnant la priorité à certains services (transmissions de télévision par exemple) plutôt qu’à d’autres (messageries personnelles par exemple). La définition de chaque classe de services n’est en effet pas prévue, et laisse aux opérateurs la discrétion de déterminer quels services sont équivalents à d’autres, et ce au détriment des abonnés. D’un point de vue purement pratique enfin, un tel système est extrêmement difficile à mettre en place au sein de l’Internet global, qui ne se limite pas aux frontières juridiques de la France, mais demande une réelle coopération internationale.
Publié le
Updated on
20.01.2016