En Ouganda, les journalistes font face à des intimidations et des violences quasi quotidiennes. Ils sont régulièrement pris pour cible par les services de sécurité, premiers auteurs d’attaques contre les reporters dans le pays.
Paysage médiatique
Le pays compte plus de 200 radios et une trentaine de chaînes de télévision, mais beaucoup appartiennent à des membres ou des soutiens du Mouvement de résistance nationale (NMP), le parti au pouvoir. Les médias détenus par l’État sont nombreux, influents et inféodés au régime de Yoweri Museveni, à la tête du pays depuis 1986. Il existe des médias privés qui produisent des informations de qualité, à l’instar de ceux détenus par le Nation Media Group : KFM, Dembe FM, NTV, NBS ou encore le journal The East African, une référence en matière de journalisme dans la région.
Contexte politique
Le président Museveni ne tolère pas la critique et tient régulièrement des propos haineux à l’égard de la presse, comme lorsqu’il a menacé de pousser à la faillite le Daily Monitor, le premier quotidien du pays, en 2021 ou traité les journalistes de “parasites” en 2018. Il n’est pas rare que les autorités interfèrent directement dans la diffusion de certains reportages TV en demandant leur suppression des programmes, comme en 2019 lorsque la police a débarqué dans trois radios privées pour empêcher la prise de parole d’un chef de l’opposition. L’organe de régulation des médias est directement contrôlé par le gouvernement.
Cadre légal
Bien que garantie par la Constitution, la liberté de la presse est entravée par de nombreuses lois, comme celles sur les activités numériques frauduleuses, sur l'antiterrorisme ou encore sur l’ordre public. En 2021, la cour constitutionnelle a rejeté les recours d’associations de journalistes contre des dispositions liberticides de la loi sur les médias. Le pays dispose d’une loi d’accès à l’information, mais les journalistes se heurtent à de nombreux obstacles et à l’autocensure dès qu’ils sollicitent une information d’intérêt public.
Contexte économique
Les journalistes font partie des professionnels les moins bien payés du pays. Les contrats de travail sont rares, et peu nombreux sont ceux qui gagnent plus de 200 dollars (environ 180 euros) par mois. Cette précarité financière les rend vulnérables à la corruption.
Contexte socioculturel
Plusieurs médias appartiennent à des groupes religieux, dont certains sont liés aux intérêts du régime comme le mouvement pentecôtiste, très influent dans le pays, qui compte dans ses rangs la fille et la femme du président.
Sécurité
Enlèvement, violences, séquestration, arrestation, confiscation de matériel… Toute critique envers le pouvoir peut avoir de lourdes conséquences pour les journalistes. La réélection de Yoweri Museveni pour un sixième mandat en 2021 s’est effectuée au terme d’une campagne particulièrement répressive, avec plus d’une quarantaine d’attaques contre des médias et des journalistes. Les autorités ont manié le bâton, la censure - en coupant internet - et la désinformation, en qualifiant certains journalistes d’agents de la CIA. La traque des professionnels de l’information s’est renforcée depuis la création, en juin 2017, d’une brigade d’officiers de la sécurité et d’experts informatiques chargée, entre autres, de surveiller les profils des journalistes sur les réseaux sociaux.