Une journaliste qui écrit sur les caisses noires du Kremlin empêchée de rentrer en Russie

Le 16 décembre 2007, Natalia Morar, journaliste de l'hebdomadaire New Times, à Moscou, s'est vu interdire l'entrée sur le territoire russe, alors qu'elle rentrait d'un déplacement en Israël. La journaliste, de nationalité moldave, a été reconduite au petit matin vers Chisinau, la capitale de la Moldavie. Reporters sans frontières condamne une violation patente de la liberté de la presse. « Cette mesure illustre le mépris des autorités, désormais pleinement assumé, envers la presse, ainsi que leur volonté de tenir à l'écart les journalistes récalcitrants. Les récents articles signés par la journaliste et le fait que l'interdiction de territoire ait été, selon toute probabilité, ordonnée par les services secrets (FSB) nous confortent dans notre position. L'expulsion dont Natalia Morar fait l'objet est politique. Il s‘agit de représailles en lien avec son travail de journaliste», a déclaré l'organisation. Le 16 décembre 2007, Natalia Morar est arrivée d'Israël à l'aéroport Domededovo, en compagnie d‘un groupe de journalistes. Lors du contrôle de son passeport, il lui a été signifié que sur ordre du FSB, elle ne pouvait entrer en Russie. Toutefois, les agents responsables du contrôle des passeports ont refusé de lui montrer le document sur lequel ils disaient s‘appuyer. Plus tard, la journaliste a appris que l'interdiction avait été ordonnée en vertu de l'article 27 de la loi sur l'immigration. Celui-ci permet d'interdire le territoire de la Fédération russe à tout étranger si cela s'avère nécessaire pour “préserver la défense nationale, la sécurité d'Etat, l'ordre public ou la santé de la population”, ainsi que lorsque “un citoyen étranger est désigné persona non grata dans la Fédération de Russie”. Interrogée par Reporters sans frontières, Natalia Morar a signalé avoir passé toute la nuit dans une pièce de l'aéroport Domededovo prévue pour les personnes en voie d'expulsion, dont elle n'a pas été autorisée à sortir. Elle a ensuite rejoint, par un couloir spécial, un avion à destination de Chisinau. Ses papiers d'identité, qui lui avaient été confisqués, ont été remis au personnel de bord. Ce n'est qu'après son arrivée en Moldavie, et son interrogatoire par des membres du service des frontières, qu'ils lui ont été rendus. Selon Natalia Morar, cette expulsion est liée à son activité professionnelle. Un article, paru le 10 décembre 2007 dans New Times, intitulé “La caisse noire du Kremlin” est probablement à l'origine de ces représailles. “J'y décrivais en détail comment a été financée la campagne pour les législatives”, a déclaré la journaliste. Pour la rédactrice en chef adjointe de l'hebdomadaire, Evguenia Albats, l'expulsion de la journaliste est la “réponse des autorités aux enquêtes de Natalia Morar et au travail du magazine en général”. Le secrétaire général de l'Union des journalistes de Russie, Igor Yakovenko partage cet avis. Selon lui, “il est évident que l'expulsion de la journaliste n'a rien à voir avec la légalité”. “Quand une personne qui vit à Moscou et travaille pour un média russe en tant que journaliste professionnelle est expulsée de Russie sur la base d'un vague ordre de la Loubianka, c'est le signe qu'il existe un double standard et qu'il s‘agit de répression politique classique”, a-t-il précisé. Le FSB s'est refusé à tout commentaire sur cette affaire
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Updated on 20.01.2016