​Un responsable d'une république de Russie appelle à « buter » les journalistes et blogueurs critiques

Mise à jour : Mikhaïl Ignatiev a été renvoyé par le président russe le 29 janvier. Vladimir Poutine évoque une "perte de confiance", à la suite de deux épisodes ayant suscité un tollé dans l'opinion publique : l'appel à "buter" des journalistes et l'humiliation d'un pompier.



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Le responsable politique de Tchouvachie, l'une des républiques russes de la région de la Volga, a incité les journalistes à « buter » leurs collègues critiques du pouvoir. Reporters sans frontières (RSF) dénonce ces propos inadmissibles et demande à ce que le chef de la république soit jugé pour cet appel à la violence.


A l’occasion de la Journée professionnelle pour la presse en Russie, samedi 18 janvier, le chef de la république de Tchouvachie, Mikhaïl Ignatiev, a appelé les journalistes à « buter » ceux qui « critiquent du matin au soir ». Le verbe qu’il a utilisé-  « motchit’» -  évocateur du milieu de la criminalité russe, est celui que Vladimir Poutine avait employé en 1999 dans son appel à exterminer les combattants tchétchènes. 


Mikhaïl Ignatiev reproche aux journalistes critiques du pouvoir de provoquer « des manifestations dans les rues » et empêcher les autorités « de s’occuper de l’amélioration des espaces verts, des espaces publics, d’ouvrir de nouvelles industries ».


« Rien ne justifie une telle violence de la part des responsables politiques, dénonce la responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF, Jeanne Cavelier. Nous demandons à ce que Mikhaïl Ignatiev soit jugé pour ‘appel à la haine envers un groupe social’, en vertu de l’article 282 du Code pénal de la Fédération de Russie. Mikhaïl Ignatiev a dû s'excuser devant le tollé suscité par ses propos. Mais ses excuses partielles n’ont eu pour but que de renforcer sa critique envers les journalistes indépendants. »


Lors de la réunion hebdomadaire du gouvernement local, le 20 janvier, le responsable tchouvache a déclaré avoir toujours eu « des relations correctes avec les journalistes qui critiquent de manière objective et qui formulent correctement leurs articles », avant de s’excuser « en tant que personne au bon coeur » auprès de ceux qu’il aurait « heurté avec le terme ‘buter’». Il a également expliqué avoir fait référence aux « gens qui se disent journalistes, mais qui n’ont qu’un but - discréditer les autorités par tous les moyens possibles ».


Ce n’est pas la première fois que Mikhaïl Ignatiev part en campagne contre les journalistes critiques. En janvier 2019, le chef de la région avait qualifié de « fake et inventées » les informations sur le dopage dans les institutions sportives tchouvaches, alors même que ces violations avaient été confirmées par l’Agence russe antidopage (RUSADA).


Le responsable tchouvache n’a pas été le seul à profiter de la journée de la presse pour exprimer ses griefs contre les journalistes critiques. Le chef de la région de Mordovie s’est également plaint, le 17 janvier, des journalistes « réfractaires » et de leurs attaques contre lui. Tout comme Mikhaïl Ignatiev, il considère que ces derniers nuisent au travail de l’administration régionale. 


La Russie occupe la 149e place au Classement mondial de la liberté de la presse 2019 de RSF.

Publié le
Updated on 29.01.2020