Un journaliste en ligne abattu : “Gare aux mesures d’affichage dans la lutte contre l’impunité”

Employé depuis douze ans du site Hondudiario José Noel Canales Lagos, 34 ans, a été tué par balles, le 10 août 2012 à Comayagüela, portant à 30 le nombre de journalistes honduriens assassinés en une décennie, dont 25 depuis le coup d’État du 28 juin 2009. Cette nouvelle tragédie a cruellement coïncidé avec la récente visite dans le pays, du 7 au 14 août, du rapporteur spécial de l’ONU pour la liberté d’expression, Frank La Rue. Cette visite a donné lieu à l’annonce par le gouvernement, le 9 août, de la prochaine mise en place d’une structure dédiée à la protection des journalistes et à la résolution des nombreux cas d’assassinats qui ont endeuillé la profession ces dernières années. “En admettant que cette annonce exprime une réelle volonté politique, elle intervient après des années d’impunité et d’inaction, qui expliquent en grande partie l’ampleur d’un aussi macabre bilan. Le projet gouvernemental fait référence aux mécanismes de protection à l’œuvre en Colombie. Pour autant, la structure qu’il devrait instituer fait inévitablement penser au Parquet spécial fédéral (FEADLE) mis en place au Mexique en 2006. Loin, très loin, d’avoir produit les résultats attendus, ce précédent mexicain rappelle qu’un organisme compte moins en soi que les objectifs concrets et les moyens adéquats exigés par la lutte contre l’impunité”, a déclaré Reporters sans frontières. “Comme leurs collègues du Mexique, les journalistes du Honduras – mais aussi les défenseurs des droits de l’homme, représentants des mouvements sociaux, avocats ou universitaires engagés au service de l’information - ne sortiront de la spirale du crime, de la menace et de la censure qu’au prix d’une profonde réforme de fonctionnement des appareils judiciaire et policier. Une nouvelle structure sera-t-elle capable de faire enfin appliquer les mesures de protection dont bénéficient en théorie un certain nombre de journalistes à la demande de la Commission interaméricaine des droits de l’homme ? Pourra-t-elle reprendre intégralement et sans entraves des enquêtes bâclées ou enterrées ? Saura-t-elle prendre en compte, en matière de droits humains, la violence générée par le coup d’État de 2009 et ses incidences directes sur la liberté d’information ? Gare aux mesures d’affichage quand la loi peut et doit s’appliquer, dans l’affaire José Noel Canales comme dans les précédentes”, a ajouté l’organisation. José Noel Canales se rendait en voiture à son lieu de travail lorsque des individus circulant à bord d’un taxi ont ouvert le feu dans sa direction, l’atteignant notamment à la tête. Le mobile du crime reste à déterminer. Tout en refusant pour l’instant d’avancer l’hypothèse professionnelle, la rédaction d’Hondudiario signale, dans une note d’hommage à son employé assassiné, avoir fait l’objet de menaces régulières depuis 2009.
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Updated on 20.01.2016