Jim Taricani, de la chaîne WJAR-TV10, a été condamné à une amende pour "outrage à la cour" après avoir refusé de révéler ses sources à un tribunal. Aux Etats-Unis, le secret des sources constitue régulièrement une pierre d'achoppement entre le pouvoir judiciaire et la presse.
Reporters sans frontières proteste contre la condamnation à une amende de Jim Taricani, de la chaîne WJAR-TV10, pour avoir refusé de révéler ses sources à un tribunal.
"Une nouvelle fois, le secret des sources, pierre angulaire de la liberté de la presse, est menacé par la justice américaine. Contraindre les journalistes à identifier leurs sources, c'est remettre en cause un fondement du journalisme d'investigation, si nécessaire à la démocratie", a rappelé Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. L'organisation a appelé la cour d'appel compétente à revenir sur la décision du juge Torres.
Le 16 mars 2004, Jim Taricani, reporter local de la chaîne de télévision WJAR-TV10, a été condamné à 1 000 dollars d'amende par jour pour "outrage à la cour" par le juge fédéral Ernest C. Torres de Providence (Etat de Rhode Island).
Le journaliste a refusé de révéler au tribunal l'identité de la personne qui lui avait fourni une vidéo réalisée dans le cadre d'une enquête secrète du Bureau d'enquête fédérale (Federal Bureau of Investigation, FBI). Diffusée le 1er février 2001, cette vidéo montrait un ancien haut fonctionnaire de la municipalité de Providence acceptant un pot-de-vin d'un informateur du FBI. Le maire de Providence, Vincent "Buddy" Cianci Jr. avait par la suite été condamné à cinq ans de prison pour corruption.
Une enquête spéciale avait été ouverte sur l'origine de la fuite alors que la cassette faisait l'objet d'un "ordre de protection" émis par une cour fédérale en août 2000, interdisant expressément aux avocats, enquêteurs et parties de diffuser les cassettes liées au dossier afin de ne pas mettre les investigations en péril. En octobre 2003, le juge Torres avait déclaré que la nécessité de connaître la source du journaliste l'emportait sur tout préjudice porté à la liberté de circulation de l'information.
Jim Taricani a déclaré à la presse locale qu'il ne révèlera pas ses sources car il s'estime couvert par le Premier amendement de la Constitution protégeant la liberté d'expression. Son avocat a fait appel, suspendant de fait la sanction prononcée par le juge Torres.
Aux Etats-Unis, le secret des sources constitue régulièrement une pierre d'achoppement entre le pouvoir judiciaire et la presse. Depuis octobre 2003, cinq journalistes des quotidiens New York Times et Los Angeles Times, de l'agence Associated Press et de la chaîne CNN font l'objet d'un ordre d'un juge fédéral de révéler leurs sources. Les cinq journalistes avaient enquêté sur l'affaire Wen Ho Lee, un scientifique accusé d'espionnage puis blanchi par la justice. Le magistrat estime que Wen Ho Lee a le droit de savoir qui, au sein de l'administration pour laquelle il travaillait, a été à l'origine de sa mise en cause dans les médias.
En juillet 2001, la journaliste Vanessa Leggett avait été emprisonnée pendant près de six mois pour "outrage à la cour". Elle avait refusé de révéler à une cour du Texas le contenu d'une interview qu'elle avait réalisée du principal suspect d'un crime.