« Un an jour pour jour après l'assassinat d'Alisher Saipov, nous appelons les autorités kirghizes à relancer l'enquête. L'absence de progrès substantiel dans l'investigation, qui a été suspendue à deux reprises, est honteuse", a déclaré Reporters sans frontières. L'organisation demande que la piste professionnelle soit prise au sérieux, tout comme les soupçons qui pèsent sur l'implication de membres des services de sécurité ouzbeks dans le crime.
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« Un an jour pour jour après l'assassinat d'
Alisher Saipov, nous appelons les autorités kirghizes à relancer l'enquête. L'absence de progrès substantiel dans l'investigation, qui a été suspendue à deux reprises, est honteuse. Pour l‘heure, ni les auteurs ni les commanditaires n'ont été identifiés. Cet état de fait entretient une impunité scandaleuse », a déclaré Reporters sans frontières.
« La piste professionnelle doit être prise au sérieux et ne pas être négligée au profit d'explications ayant trait uniquement aux orientations politiques d'Alisher Saipov - qui soutenait le parti d'opposition ouzbek en exil, “Erk” - ou aux contacts qu'ils auraient pu avoir avec des représentants de mouvements religieux interdits. De plus, les soupçons qui pèsent sur l'implication de membres des services secrets ouzbeks, Tachkent et Bichkek doivent collaborer pour élucider les circonstances du meurtre de ce journaliste réputé», a poursuivi l'organisation de défense de la liberté de la presse.
“Enfin, nous nous joignons aux proches et aux collègues d'Alisher Saipov qui lui rendront hommage aujourd'hui à Osh, pour rappeler que nous ne l'oublions pas”, a conclu Reporters sans frontières.
Le 24 octobre 2007, vers 19 heures, Alisher Saipov a été abattu de trois balles, dont une tirée à bout portant qui l'a atteint à la tête, alors qu'il sortait des bureaux de Radio Free Europe, dans le centre d'Osh, deuxième ville du pays. Le journaliste âgé de 26 ans contribuait à ce média ainsi qu'à Voice of America. Il écrivait également pour des sites d'informations comme Uznews et Ferghana ainsi que pour l'organisation Institute for War and Peace Reporting, basée à Londres. Il publiait un hebdomadaire en ouzbek, Siyosat, consacré à l'actualité politique kirghize et ouzbèke, qu'il distribuait en Ouzbékistan. Un mois avant son assassinat, il avait été qualifié de « complice des forces cherchant à déstabiliser le pays » par une télévision régionale de Namagan, en Ouzbékistan.
Les premiers jours suivant la mort du journaliste, les autorités ont déclaré explorer activement la piste professionnelle et ne pas exclure la possibilité de l'implication des services secrets ouzbeks. Le président de la République lui-même, Kourmanbek Bakiev, a déclaré s'impliquer personnellement dans ce dossier. Mais les déclarations contradictoires se sont rapidement multipliées, écartant la piste professionnelle et laissant entendre que le journaliste auraient entretenu des liens avec des groupes islamistes interdits en Ouzbékistan - Hizb ut-Tahir notamment - qui auraient une relation avec sa mort.
En février 2008, l'enquête a été suspendue pour ”faute de preuves” selon le responsable de la direction de la lutte contre le crime organisé et “en raison de l'expiration du délai de l'enquête préliminaire”, selon le nouveau ministre de l'Intérieur.
Relancée, l'enquête a été stoppée une deuxième fois à la fin du mois de mars 2008, officiellement en raison de l'incapacité de la police à identifier un suspect. Les parents d'Alisher Saipov ont d'ailleurs été informés de cette décision de manière fortuite, alors qu'ils s'étaient rendu au commissariat pour réclamer l'ordinateur de leur fils saisi pour les besoins de l'enquête.
En juin, le père du journaliste, Avas Saipov, a adressé une lettre au président kirghize dans laquelle il accusait les autorités ouzbèkes d'être responsables de l'assassinat et celles du Kirghizstan d'avoir été incapables d'assurer la sécurité du journaliste.
En juin, le ministère de l'Intérieur a réagi en déclarant que l'examen de l'affaire se poursuivait et que le groupe d'enquêteurs avait réalisé un travail considérable, sans pour autant révéler le moindre contenu. Le porte-parole du ministère a affirmé que dans le cas où des preuves impliquant les services secrets ouzbeks seraient découvertes, il n'hésiterait pas à en faire part directement aux autorités de Tachkent. Depuis, l'enquête n'a pas porté ses fruits.
En février, l'organisation International Crisis Group avait publié un rapport d'enquête concluant au caractère politique de la mort du journaliste et à l'implication probable des services secrets ouzbeks.