Turkménistan : le correspondant d’un média indépendant condamné à quatre ans de prison
Au Turkménistan, l’un des pays les plus dangereux pour les journalistes, l’un d’eux, Nourgeldy Halykov, a été emprisonné après avoir transmis une simple photo à un site d’informations. Reporters sans frontières (RSF) appelle la nouvelle représentante de l’OSCE pour la liberté des médias à œuvrer pour sa libération.
La sentence a été lourde pour le reporter Nourgeldy Halykov, condamné le 15 septembre à quatre ans de prison pour “fraude”. Détenu au Turkménistan depuis le 13 juillet, le journaliste a été arrêté un jour après avoir envoyé au site d’informations indépendant Turkmen.news une photo de la délégation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en visite dans le pays.
Nourgeldy Halykov, 26 ans, travaillait clandestinement pour ce média spécialisé dans les droits de l'Homme et basé aux Pays-Bas. Sa famille ne souhaitait pas communiquer sur son cas, dans l’espoir d’une amnistie à l’occasion de la Journée internationale de la neutralité le 12 décembre, dont il n’a finalement pas bénéficié.
“Le Turkménistan est un véritable trou noir de l’information, rappelle la responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF, Jeanne Cavelier. Les médias sont entièrement contrôlés par l’Etat et rares sont les journalistes qui prennent le risque d’informer de manière indépendante. La condamnation de Nourgeldy Halykov illustre l’absurdité des charges fabriquées par les autorités pour museler les derniers représentants d’une presse libre. Il risque la torture en prison. Nous enjoignons les autorités à le libérer immédiatement et appelons la représentante de l’OSCE (l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) pour la liberté des médias Teresa Ribeiro à condamner fermement cette détention arbitraire.”
Le journaliste avait trouvé la photo des experts de l’OMS sur le compte Instagram d’une ancienne camarade de classe, qui a subi des pressions après la publication de la photo par Turkmen.news. Elle a alors supprimé la photo de son compte et demandé à Nourgeldy Halykov s’il l’avait relayée. Le journaliste a ensuite été convoqué au commissariat puis placé en détention provisoire. Le 26 juillet, il a été poursuivi pour “fraude” pour une dette de plus de 4000 euros qu’il n’aurait pas remboursée en début d’année. C’est son ancien ami et champion de tennis Iouri Rogousskiy qui a porté plainte contre lui.
Le Turkménistan, le seul pays au monde avec la Corée du Nord n’ayant encore reconnu aucun cas de coronavirus malgré une hausse des “pneumonies”, est l’un des plus fermés au monde. Le président Gourbangouly Berdymoukhammedov poursuit sa politique de répression systématique des journalistes travaillant pour des médias indépendants. Ceux qui ne véhiculent pas une “image positive” du Turkménistan sont la cible d’arrestations arbitraires, comme les correspondants de Radio Azatlyk (l’antenne locale de la radio américaine Radio Free Europe / Radio Liberty) Khoudaïberdy Allachov, condamné en 2017 pour détention de tabac à chiquer, et Saparmamed Nepeskouliev, qui a passé trois ans en prison pour détention de drogue, une affaire montée de toutes pièces.
Le Turkménistan occupe la 179e place sur 180 du Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.