Turkménistan : RSF dénonce la tentative d’empoisonnement sur Soltan Achilova
La journaliste indépendante Soltan Achilova révèle une tentative d'empoisonnement commise contre elle par les autorités turkmènes en novembre 2024. Après cet échec, elles l’avaient empêchée de quitter le territoire, en la séquestrant sous prétexte d’une maladie infectieuse. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cette atteinte à la vie de Soltan Achilova et exhorte la communauté internationale à interpeller les autorités turkmènes sur son cas et sur la privation du droit à l’information des citoyens du pays.
“Ils ne se calmeront pas tant qu’ils ne m’auront pas anéantie. Tout cela est dirigé par Gurbanguly et Serdar [Berdimuhamedow, ancien et actuel présidents du Turkménistan], tout est fait sur leurs ordres.” Soltan Achilova, pionnière du journalisme indépendant dans l’une des pires dictatures au monde, affirme dans une vidéo pour le média en exil Chronicles of Turkmenistan qu’elle a été victime d’une tentative d'empoisonnement en novembre 2024. Quelques jours avant son voyage prévu à Genève, en Suisse, pour recevoir le prix Martin Ennals, un homme se rend chez elle pour dénoncer la corruption d’un agent de police. Il revient deux jours plus tard lui apporter des samsas (chaussons farcis), en lui expliquant que son problème avait été résolu. La voisine de Soltan Achilova, présente lors de cette visite, consomme l’une des bouchées. Une quinzaine de minutes plus tard, elle perd connaissance, et doit être transportée à l’hôpital en soins intensifs.
“Dans cette dictature d'Asie centrale, coupée du monde, tout est orchestré pour faire taire les voix dissidentes et les citoyens sont privés de leur droit à l’information. Cette tentative d’empoisonnement et le harcèlement subi par Soltan Achilova témoignent de la détermination des autorités à éradiquer toute velléité de journalisme indépendant. RSF craint pour la vie et la santé de la photojournaliste septuagénaire et exhorte la communauté internationale à interpeller les autorités turkmènes sur son cas ainsi que sur l’imposition intolérable d’une censure d'État systémique.
Le 20 novembre à 6 heures 30 du matin, alors que Soltan Achilova s’apprête à partir avec sa fille pour prendre l’avion, des hommes en blouse blanche se présentent à son domicile. À peine a-t-elle le temps de fermer la porte que l'un d’eux lui arrache la clé des mains, en lui adressant une menace de mort à peine voilée : “Pourquoi as-tu besoin d'une clé dans l'autre monde ?” Emmenée de force dans un centre de prévention et de traitement des maladies infectieuses de la capitale, Achgabat, alors qu’elle ne présentait aucun signe de maladie, elle est séquestrée pendant 6 jours sans pouvoir donner de nouvelles.
Soltan Achilova est l'une des rares journalistes au Turkménistan à travailler avec des médias indépendants sans cacher son identité. Depuis ses débuts journalistiques en 2006, elle est victime d’intimidations, d’insultes, d’agressions physiques. Ses proches sont traqués et questionnés sur ses faits et gestes, son téléphone est mis sur écoute. De plus, ce n'est pas la première fois que les autorités empêchent Soltan Achilova de sortir du territoire. En 2023, un garde-frontière avait délibérément abîmé son passeport afin de le déclarer invalide, alors qu’elle allait se rendre à Genève.