RSF demande à Londres de prendre des mesures contre l’instigateur de l’attaque de ARY News à Karachi

Suite à l’attaque par des militants armés du Muttahida Qaumi Movement (MQM) des locaux de la chaîne de télévision ARY News à Karachi le 22 août 2016, Reporters sans frontières (RSF) demande au gouvernement britannique d’inculper le leader en exil du mouvement, Altaf Hussain, qui a ouvertement appelé ses militants à perpétrer cette attaque.


Le 22 août, s’adressant par téléphone depuis Londres aux militants du mouvement du MQM manifestant à Karachi, Altaf Hussain a vertement critiqué la presse pakistanaise, avant d’enjoindre ses supporters à «attaquer les bureaux des chaînes de télé». Ces derniers se sont exécutés dans les minutes qui ont suivi en lançant un assaut contre la chaîne de télévision ARY News, dans le quartier de Saddar, et contre le Karachi Press Club. Des pierres ont été lancées depuis l’extérieur, certains militants auraient tiré devant les locaux de la chaîne, tandis que d’autres armés de bâtons ont pénétré dans les locaux et causé d’importants dégâts matériels avant de s’en prendre au personnel de la chaîne.



Selon les informations obtenues par Freedom Network, au moins deux reporters et quatre cameramen de Samaa TV, Neo TV, Channel 24, ARY News, Dunya News et 92 News ont été légèrement blessés durant l’attaque. Les autorités ont rapidement réagi et procédé à une dizaine d’arrestations ainsi qu’à la dispersion des militants. Le Premier ministre Nawaz Sharif a condamné les menaces et les attaques contre les médias, les qualifiant d’atteinte «à la liberté de la presse et d’expression», et plaidé pour une protection totale des professionnels des médias. Un porte-parole de la police du Sindh a ordonné une protection renforcée des médias dans Karachi, capitale de la province.



«Nous saluons la réaction des autorités face à ces actes de violence organisée, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. Au vu de l’origine de cette violence, directement commanditée par Altaf Hussain depuis Londres, nous demandons au gouvernement britannique de prendre ses responsabilités et d’engager des poursuites à son encontre. L’incitation directe par un chef politique à commettre des agressions contre les journalistes est un crime qui ne saurait être ignorée par les autorités britanniques, quand bien même les violences ne sont pas survenues au Royaume-Uni. Londres détient une occasion de contribuer directement à la lutte contre l’impunité des crimes contre les journalistes.»



Les médias pakistanais ne diffusent plus de discours en direct ni d’image du leader du MQM Altaf Hussain, depuis une interdiction de la Haute Cour de Lahore, en 2015. Désormais ressortissant britannique, le leader politique continue néanmoins de s’adresser à distance aux membres et militants de son parti.


Reporters sans frontières salue par ailleurs l’union dont a fait preuve la presse pakistanaise qui a unanimement condamné les attaques, dépassant ainsi les clivages politiques pour se rassembler au nom de la liberté de la presse. Cette coalition demeure plus que jamais nécessaire dans l’un des pays les plus dangereux pour les professionnels des médias.


Le Pakistan figure au 147e rang sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse 2016.

Publié le
Mise à jour le 29.08.2016