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C’est avec stupeur et colère que nous avons appris l’odieuse agression, qui s’apparente à un acte de torture, du correspondant de RFI et de l’AFP, déclare Christophe Deloire, secrétaire général de RSF.
Nous demandons aux autorités l’ouverture immédiate d’une enquête afin d’identifier et de punir les auteurs de cet acte barbare. Alors que le pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la crise, quand les autorités burundaises comprendront-elles que les journalistes sont un vecteur essentiel de stabilité démocratique ? Les autorités doivent impérativement assurer la sécurité des professionnels des médias afin qu’ils puissent exercer librement leur travail d’information auprès de la population burundaise et internationale.”
Journaliste reconnu pour son professionnalisme,
Esdras Ndikumana s’était rendu hier sur les lieux de l’attaque qui a coûté la vie au général Adolphe Nshimirimana. Alors qu’il prenait des photos, il a été arrêté par les forces de sécurité gouvernementales. Selon nos sources, plusieurs députés et représentants gouvernementaux étaient présents lors de l’interpellation, mais aucun n’est intervenu.
Embarqué à l’arrière d’une camionnette, le journaliste a été passé à tabac. Emmené au siège du Service national de renseignement, il a été jeté par terre et frappé sur tout le corps. Après lui avoir volé ses affaires personnelles, ces tortionnaires l’ont relâché après deux heures de torture, en lui déclarant qu’il était un “
journaliste ennemi” et qu’il pouvait “
s’estimer heureux d'être encore en vie”. Hospitalisé, le journaliste est en état de choc, souffrant de sérieuses blessures, notamment aux mains et aux jambes.
La veille, il avait déjà été pris à partie à l’aéroport par des représentants des autorités sur le même thème de “
collaborateur ennemi”. Il est clair que Esdras Ndikumana a été victime d’une attaque ciblée, qui à travers lui, vise les médias internationaux, dont RFI, qui continue à émettre au Burundi. Contacté par la radio, le conseiller du président Willy Nyamitwe s’est engagé à faire toute la lumière sur ces odieux événements, sans beaucoup plus de précisions pour le moment.
Depuis la tentative de coup d’Etat le 14 mai dernier au Burundi, les médias privés sont fermés, interdits de réouvrir officiellement car sous le coup d’une enquête judiciaire sur les violences, qui peine à avancer. Les journalistes sont non seulement empêchés d’exercer librement leur activité professionnelle mais sont la cible récurrente d’attaques et de menaces en toute impunité. Des dizaines d’entre eux ont dû fuir le pays et vivent dans des conditions extrêmement précaires. Ceux qui sont restés sur place continuent de vivre dans la peur. Sans travail, ils n’ont plus de moyens de subsistance.
Le Burundi est classé en
145e sur 180 pays dans l’édition 2015 du Classement de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse.