RSF condamne la fermeture de Radio Mashaal par les autorités pakistanaises

Sur recommandation des services de renseignement, le gouvernement fédéral du Pakistan a décidé de fermer les services de Radio Mashaal, une station en pachtou financée par le Congrès américain. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités à revenir sur cette décision inique et arbitraire.

Les autorités fédérales d’Islamabad ont annoncé le 19 janvier la fermeture des services de Radio Mashaal, au prétexte que leurs programmes en langue pachtou seraient “établis contre les intérêts du Pakistan et en conformité avec les intentions d’une agence de renseignement hostile”. La note du ministère de l’Intérieur, que RSF s’est procurée (voir le document joint), suit les recommandation de la toute puissante agence de renseignement inter-services (Inter-Services Intelligence, ISI). Il est notamment reproché à la radio de “décrire le Pakistan comme un Etat qui échoue à assurer la sécurité de sa population”, comme une “plaque-tournante du terrorisme” ou encore de “montrer une population pachtou désabusée face à l’Etat”.


“Ce n’est pas aux services de renseignement qu’il revient de dicter la ligne éditoriale d’une radio qui porte une voix alternative aux populations de langue pachtou, explique Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Enquêter sur les questions de sécurité et de terrorisme, enregistrer le témoignage des acteurs de terrain… Ce n’est pas agir contre les intérêts du Pakistan : c’est ce qu’on appelle du journalisme, et c’est justement ce qui permet à une société de prospérer. Les autorités doivent revenir immédiatement sur leur décision qui est une violation grave de la liberté de la presse.”


Financée par le Congrès américain, diffusée en ondes courtes depuis Prague, Radio Mashaal a été lancée en janvier 2010 pour informer les populations pachtounes des régions frontalières d’Afghanistan et du Pakistan. Il s’agit notamment d’offrir “une alternative au nombre grandissant de radios portant la voix d’un islamisme extrémiste dans la région”, pour reprendre le communiqué publié par le diffuseur de la station, Radio Free Europe/Radio Liberty.


Sécurité des journalistes


Son président, Thomas Kent, réfute les allégations du ministère de l’Intérieur, précisant que “Radio Mashaal ne sert aucun gouvernement ni aucune agence de renseignement”. “Nos reporters sont des citoyens pakistanais dévoués à leur pays, explique-t-il. Ils vivent et élèvent leurs enfants dans les villages où ils effectuent leurs reportages.” RSF partage les inquiétudes des journalistes de la radio concernant leur sécurité, et appelle les autorités à tout faire pour la garantir.


En bonne place sur la liste noire des prédateurs de la liberté de la presse établie par RSF en 2016, l’ISI intimide régulièrement les médias qui ne suivent pas sa ligne. La couverture des questions de sécurité par les médias est une ligne rouge à ne pas franchir, sous peine d’être arrêté, molesté ou assassiné.


A l’automne dernier, les journalistes du Baloutchistan ont fait l’objet d’un ultimatum par des groupes armés séparatistes, après que les autorités leur ont interdit toute mention des conflits qui secouent cette région.


Le Pakistan est classé 139ème sur 180 pays dans l’édition 2017 du Classement mondial pour la liberté de la presse établi par RSF.

Publié le
Updated on 23.01.2018

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