Le procès du journaliste du New York Times, Zhao Yan, a été reporté une nouvelle fois, alors qu'il devait débuter le 8 juin. Reporters sans frontières dénonce les abus des procureurs et des juges et demande la libération du lauréat du prix de la liberté de la presse 2005.
Reporters sans frontières est indignée par la manière dont les procureurs et les juges instruisent l'affaire Zhao Yan, collaborateur du New York Times. Le 6 juin 2006, la Cour intermédiaire populaire n° 2 de Pékin a annoncé à son avocat, Mo Shaoping, qu'elle avait décidé de reporter une nouvelle fois le procès du journaliste. Celui-ci devait débuter le 8 juin.
“Dans cette affaire, on aura tout vu : détention au secret, mensonges ou mutisme des autorités, absence de respect des délais légaux et vices de forme. La levée des charges et la libération de Zhao Yan, lauréat du prix Reporters sans frontières - Fondation de France 2005, reste la seule issue juste et raisonnable à cette affaire”, a déclaré Reporters sans frontières.
“Nous sommes particulièrement indignés par l'attitude des procureurs qui, malgré l'absence de preuves matérielles, s'obstinent à accuser le journaliste de fraude et de divulgation de secrets d'Etat. Par ailleurs, nous sommes préoccupés car des journalistes et des dissidents ont été dans le passé lourdement condamnés par la Cour intermédiaire populaire n° 2 de Pékin pour des délits d'opinion. Certaines procédures de cette cour avaient été qualifiées de contraires aux normes internationales par des experts des Nations unies”, a ajouté l'organisation.
Le procès de Zhao Yan devait commencer le 8 juin 2006. Mais, le 6 juin, un juge a annoncé un report d'environ un mois à l'avocat qui venait de réitérer sa demande pour que les témoins de la défense soient entendus. La cour justifie ce retard par la demande de Mo Shaoping. Ce dernier a expliqué à l'agence Reuters que le juge avait tenté de faire pression sur lui pour qu'il sollicite le report.
Ce report pourrait être lié à l'absence de preuves matérielles dans les dossiers transmis à la cour par la sécurité d'Etat ou par l'incapacité du juge de décider si les témoins seront entendus ou non dans cette affaire. Reporters sans frontières réitère son appel pour que tous les témoins, notamment les correspondants du New York Times, soient auditionnés.
La tenue de ce procès fait suite à la décision, annoncée le 17 avril par les procureurs, de relancer les accusations et déférer le dossier à la Cour intermédiaire populaire n°2 de Pékin. Un mois auparavant, le 17 mars, l'avocat avait annoncé que les accusations portées contre son client avaient été levées, à la veille d'une visite du président chinois Hu Jintao aux Etats-Unis. Zhao Yan, 44 ans, n'avait toutefois pas été relâché.
La décision politique de relancer des poursuites sur la base des mêmes accusations n'est pas légale puisque les procureurs n'ont apporté aucun nouveau document ou preuve pour soutenir les accusations de “divulgation de secrets d'Etat”. C'est ce que Mo Shaoping a pu constater quand il a eu accès, fin mai, à une partie des « nouveaux dossiers » de son client. Par ailleurs, les procureurs et la sécurité d'Etat n'ont pas respecté les délais légaux.
La famille de Zhao Yan, qui n'a toujours pas été autorisée à lui rendre visite, s'est déclarée découragée par les revirements incessants de l'affaire. En revanche, Mo Shaoping a pu lui rendre visite en mai 2006.
Reporters sans frontières rappelle qu'en mai 2004, le cyberdissident Yang Jianli avait été condamné à cinq ans de prison par la Cour intermédiaire populaire n° 2 de Pékin pour "espionnage" et "entrée illégale sur le territoire chinois". L'arrestation et le procès avaient été qualifiés d'arbitraires et d'injustes par un groupe d'experts des Nations unies.
Rappel des faits sur l'arrestation de Zhao Yan :
Emprisonné depuis le 17 septembre 2004, Zhao Yan est faussement accusé d'avoir révélé à la rédaction du New York Times la retraite politique de Jiang Zemin avant son annonce officielle. Le journaliste a été placé en état d'arrestation le 20 octobre 2004, puis inculpé de « divulgation de secrets d'Etat », crime passible de la peine de mort, et de « fraude ».
Zhao Yan est détenu dans un cachot du centre de détention de la sécurité d'Etat à Pékin. Les autorités pénitentiaires auraient refusé de lui accorder certains traitements médicaux.