L'organisation condamne fermement le sabotage à l'explosif d'une station de radio gouvernementale et s'alarme, par ailleurs, des pressions persistantes de l'armée pakistanaise sur les reporters locaux au Sud-Waziristan.
Les reporters travaillant dans cette zone se déclarent "pris entre deux feux", menacés à la fois par les groupes militants d'Al-Qaïda et des Talibans et entravés dans leur travail par les forces de sécurité gouvernementales.
Le 27 juillet 2004, une station de radio locale, récemment ouverte par le gouvernement pakistanais à Wana, Sud-Waziristan (zone frontalière avec l'Afghanistan), a été la cible d'un attentat à la bombe, qui a provoqué l'interruption de ses programmes.
Reporters sans frontières rappelle que les installations et les locaux des médias ne constituent pas des cibles militaires légitimes au regard des Conventions de Genève, à moins qu'ils ne contribuent activement à la poursuite d'objectifs militaires. L'organisation condamne avec fermeté cette attaque qui aurait pu provoquer de nombreuses victimes.
La tour d'émission de la radio gouvernementale a été sérieusement endommagée, le 27 juillet, par deux explosions, suivies d'une courte fusillade entre les auteurs de l'attentat et les forces de l'ordre.
Le 29 juillet, la station de radio n'avait toujours pas recommencé d'émettre. Cette radio locale en langue pashtoune avait été inaugurée le 20 juillet dernier et diffusait notamment des programmes musicaux et d'information.
Ce sabotage s'est produit dix jours à peine après la dénonciation par l'Union des journalistes des zones tribales (Tribal Union Journalists, TUJ) des conditions extrêmes de travail pour les journalistes au
Sud-Waziristan.
La TUJ a organisé à Islamabad le 17 juillet, avec le soutien de Reporters sans frontières, une conférence de presse sur la situation des journalistes au Sud-Waziristan. Reporters sans frontières s'est associé à la TUJ pour réclamer le respect de la libre circulation des journalistes et du principe d'indépendance des médias.
Lors de cette conférence de presse, à laquelle ont assisté des diplomates étrangers, des organisations non-gouvernementales et des représentants de la société civile, la TUJ a lu la résolution suivante : "Nous condamnons les restrictions imposées aux journalistes des zones tribales dans l'exercice de leur mission d'information au
Sud-Waziristan et demandons au gouvernement pakistanais de prendre les mesures nécessaires pour faire respecter la liberté de la presse".
La TUJ a en outre déploré l'application de la loi sur la régulation des crimes frontaliers (Frontier Crimes Regulations, FCR), qui crée un régime d'exception dans les zones tribales, permettant ainsi aux forces de sécurité d'enfreindre le principe du respect des sources journalistiques.
Sailab Mehsud, président de la TUJ, a affirmé avoir reçu des lettres anonymes et des menaces téléphoniques et en a attribué certaines à l'administration locale. Sailab Mehsud a également accusé celle-ci de vouloir réduire à néant la présence des journalistes dans les zones d'opération militaire. "Même les journalistes voyageant dans cette région pour des motifs personnels sont jetés de leur voiture et envoyés en prison", avait-t-il affirmé.
Depuis mars 2004, il est quasiment impossible pour les journalistes de rendre compte des opérations militaires menées par les autorités pakistanaises contre Al-Qaïda et les Talibans au Sud-Waziristan. Reporters sans frontières a recensé au moins une dizaine d'interpellations de journalistes dans cette zone entre mars et juin 2004.