Fu Xiancai, un défenseur des droits des déplacés du barrage des Trois Gorges, a été attaqué par des inconnus, le 8 juin, après avoir donné une interview à une chaîne allemande. Il est depuis paralysé. Ses agresseurs auraient été engagés pour le punir d'avoir témoigné.
Reporters sans frontières a interpellé le ministre chinois des Affaires étrangères, Li Zhaoxing, sur l'affaire Fu Xiancai, un citoyen chinois paralysé après avoir été battu par des inconnus qui lui reprochaient d'avoir été interviewé par une chaîne allemande. Un délinquant aurait été recruté par les autorités locales pour punir ce défenseur des droits des déplacés du barrage des Trois Gorges.
« Votre ministère a la charge d'organiser et de contrôler le travail des journalistes étrangers sur le territoire chinois, vous avez donc la responsabilité de garantir leur sécurité et celle de leurs interlocuteurs. Un tel niveau de violence est une nouvelle preuve du manque de progrès dans ce domaine. Il ne suffit pas de soigner Fu Xiancai, étrangement tenu à l'écart de sa famille et de la presse. Il faut aussi sanctionner les coupables. »
« A deux ans des Jeux olympiques d'été de Pékin, il est extrêmement inquiétant que des méthodes aussi brutales soient utilisées pour punir les citoyens chinois qui osent parler aux journalistes étrangers. Cette affaire, et bien d'autres, montre que les engagements de Pékin auprès du Comité international olympique de garantir une totale liberté aux journalistes étrangers ne sont pas du tout respectés ».
« Votre ministère n'a de cesse de surveiller, de rappeler à l'ordre et d'entraver les mouvements des correspondants étrangers. En revanche, rien n'est fait pour garantir la sécurité des journalistes chinois et des citoyens qui osent travailler ou témoigner. Nous vous demandons notamment de réformer au plus vite le « Guide des correspondants étrangers », a conclu l'organisation.
Selon l'organisation Human Rights in China, Fu Xiancai, habitant du village de Yangguidian (province du Hubei, Centre), a été frappé au cou, le 8 juin 2006, par un ou des inconnus alors qu'il sortait d'un commissariat de Zigui. Il a eu la colonne vertébrale brisée. Depuis, il est paralysé. Soigné à l'hôpital de Yichang, il est interdit de contact avec sa famille.
Le 19 mai, trois semaines avant l'agression, la chaîne de télévision allemande ARD avait diffusé une interview à visage découvert de Fu Xiancai, dans laquelle il critiquait l'attitude des autorités à l'encontre des déplacés du barrage des Trois Gorges, le plus grand projet hydroélectrique du monde.
Le directeur de la télévision régionale NDR (dont dépend la chaîne ARD) et le ministre allemand des Affaires étrangères se sont adressés aux autorités chinoises pour dénoncer cette agression. Jobst Plog, directeur de la NDR, a ainsi déclaré : « Il ne fait aucun doute que l'agression est un acte de vengeance, notamment en raison de ses déclarations à la télévision allemande. »
Fu Xiancai est connu pour s'être opposé à son expulsion lors de la construction du barrage des Trois Gorges. Après avoir publiquement dénoncé l'absence de compensations pour lui et des milliers d'autres habitants, il avait été menacé et agressé par des officiels en 2004 et 2005.
Reporters sans frontières est particulièrement préoccupée par la multiplication des agressions de journalistes et d'activistes par des délinquants souvent aux ordres des autorités locales ou d'hommes d'affaires. Déjà en octobre 2005, Lu Banglie, militant anticorruption du village de Taishi (Sud), avait été passé à tabac par des délinquants recrutés par les autorités. Il venait de s'entretenir avec Benjamin Joffe-Walt, journaliste du quotidien britannique The Guardian.