Reporters sans frontières écrit au Premier ministre Meles Zenawi
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Le 5 mai 2010, Reporters sans frontières a adressé une lettre au Premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, pour lui exprimer son inquiétude concernant la dégradation, depuis plusieurs semaines, du climat pour les journalistes en Ethiopie. L'organisation lui demande de réviser, en concertation avec les journalistes, le code de la presse adopté en mars, et demande également que les émissions en amharique de la radio Voice of America, actuellement brouillées de façon discontinue par le gouvernement, soient rétablies. Enfin, elle soulève le cas des deux journalistes de l'Agence éthiopienne de radio et télévision (ERTA) détenus depuis plus d'une semaine.
"Le climat de peur, que nous dénoncions en décembre 2009 lorsque l'hebdomadaire Addis Neger avait décidé de cesser de paraître, nous semble plus que jamais d'actualité en Ethiopie, à l'approche des élections générales du 23 mai prochain. Nous sommes très préoccupés par le caractère intimidant pour les journalistes de toutes les mesures prises ces derniers mois par votre gouvernement, limitant les possibilités d'information et de débat pluraliste, et annihilant toute velléité de critique. Les prochaines élections sont une occasion rare de montrer au peuple éthiopien et à la communauté internationale que vous êtes prêt à organiser des scrutins libres et transparents, couverts sans difficulté par les journalistes éthiopiens et étrangers", a écrit l'organisation au chef du gouvernement éthiopien.
"Nous demandons à la justice éthiopienne de garantir à Haileyesus Worku et Abdulsemed Mohammed un procès juste et équitable, lequel devra prouver que les accusations portées à leur encontre sont fondées. En attendant, nous demandons que les deux journalistes soient remis en liberté provisoire", a ajouté Reporters sans frontières.
Arrêtés le 26 avril dernier par des officiers de la Commission éthiopienne de l'éthique et de la lutte contre la corruption, Haileyesus Worku, rédacteur en chef, et Abdulsemed Mohammed, reporter, sont accusés d'avoir volé et vendu des programmes de la télévision nationale à la chaîne de télévision étrangère Al-Jazeera.
Le 30 avril, ils ont comparu devant la 13e chambre de la Cour fédérale, sans avoir été formellement mis en accusation. Le juge a ajourné leur procès au 10 mai, offrant ainsi aux enquêteurs une semaine supplémentaire pour approfondir les investigations, et prolongeant de fait la durée de la détention provisoire des deux journalistes. Ces derniers demeureront en prison au moins jusqu'à cette date. A propos de cette affaire, le ministre éthiopien de la Communication, Bereket Simon, a déclaré qu'elle était purement criminelle et en rien liée à la question de la liberté de la presse.
En mars dernier, Meles Zenawi a reconnu que son gouvernement pourrait brouiller les émissions de Voice of America (VOA) en amharique dans les semaines qui suivaient, au motif que VOA serait coupable, selon lui, de "propagande déstabilisatrice".
Enfin, le nouveau code de la presse, adopté au début du mois de mars dans l'optique des prochaines élections générales, pose un grand nombre de restrictions aux libertés des journalistes. Ces derniers ne pourront pas interviewer des électeurs, des candidats ou des observateurs le jour même du scrutin. L'un des articles du code énonce que "les professionnels des médias doivent se retenir de rapporter tout ce qui pourrait inciter à la rébellion et au terrorisme". "La formulation générale de ce principe peut donner lieu à une interprétation extensive et expose les journalistes à de possibles arrestations arbitraires. Nous sommes enfin très préoccupés par le fait que le non-respect de ce code puisse valoir aux journalistes des peines de prison ferme", a conclu Reporters sans frontières.
Photo : Meles Zenawi (AFP / Olivier Morin)
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Updated on
20.01.2016