Prix Nobel de la paix : un hommage universel à la liberté d'expression
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À l'issue de la cérémonie d'attribution du prix Nobel de la paix 2010 à l'intellectuel chinois Liu Xiaobo, Reporters sans frontières, présente à Oslo, en Norvège, salue un événement historique qui célèbre l'importance primordiale de la liberté d'expression. Ce prix est un hommage à tous les militants de la libre parole, comme l'avait été l'attribution de ce prix au Russe Andrei Sakharov ou à la Birmane Aung San Suu Kyi.
Si elle veut redorer son image internationale, la Chine doit libérer Liu Xiaobo, son épouse, et tous les prisonniers d'opinion, et montrer un engagement clair en faveur des principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Si le gouvernement de Pékin, comme c'est à craindre, choisit de continuer sur la voie de la répression, tous ses efforts, notamment médiatiques, pour améliorer son image, seront réduits à néant.
Il est urgent de libérer Liu Xiaobo.
Le 10 décembre 2010, le prix Nobel de la paix a été symboliquement remis à Liu Xiaobo, en son absence. Ni lui ni sa famille n'ont été autorisés par Pékin à venir recevoir la médaille du Nobel à Oslo. Une chaise vide a remplacé le plus célèbre prisonnier d'opinion chinois. Le président du Comité Nobel Thorbjoern Jagland s'est exprimé sur le symbole de la chaise vide : "Un symbole très fort qui démontre bien que ce prix était pertinent." Il ajoute lors de son discours pour la remise du prix : "Nous regrettons que le lauréat ne soit pas présent. Il est isolé dans une prison au nord de la Chine. La femme du lauréat, Liu Xia, ou ses proches n'ont pas non plus pu être des nôtres. Ce seul fait montre que le prix était nécessaire et approprié. Nous récompensons Liu Xiaobo avec le prix de la paix de cette année."
L'actrice norvégienne Liv Ullmann a lu le texte que Liu Xiaobo avait fait parvenir à sa femme juste avant son procès prévu le 25 décembre 2009 à Pékin, intitulé : "Je n'ai pas d'ennemis". C'est la première fois depuis 1936, date à laquelle le régime nazi avait empêché un militant pacifiste de sortir du pays, que le lauréat ne peut pas être présent ou représenté.
Jean-François Julliard, secrétaire général et Vincent Brossel, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières étaient présents à la cérémonie et ont participé aux différents rassemblements qui ont eu lieu à Oslo en faveur de la libération de Liu Xiaobo.
Reporters sans frontières déplore le manque de courage de certains gouvernements élus démocratiquement, notamment les Philippines, la Colombie, le Venezuela, la Serbie ou encore le Pakistan, qui ont choisi de ne pas assister à la cérémonie. Ces refus décidés sous la pression de Pékin sont des atteintes à la souveraineté de ces pays. Au total, 19 pays auraient décliné l'invitation. Pékin avait ordonné aux autres pays de boycotter l'événement et menacé de "conséquences" les Etats qui soutiendraient Liu Xiaobo.
À cette célébration internationale, les autorités de Pékin ont répondu par l'invective, qualifiant le lauréat de "criminel" et ses supporters de "clowns". La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mme Jiang Yu, avait affirmé que la cérémonie serait "boudée" par la majorité" de la communauté internationale. Le journal officiel chinois Global Times écrivait jeudi :" L' Occident se sert de cette édition du prix Nobel de la paix pour sonner la charge contre l'idéologie de la Chine, en cherchant à saper le cadre propice à son développement futur", ou encore, "L'Occident fait preuve d'une grande créativité dans sa conspiration contre la Chine".
La Chine a également répondu par des manipulations qui ne trompent pas, comme la création soudaine d'un prix "Confucius de la paix", d'un montant de 100 000 yuans (11 400 euros), décerné à Pékin par une association chinoise à l'ancien vice-président taïwanais Lien Chan, pour avoir favorisé le rapprochement entre Taiwan et Pékin. Lien Chan ignorait l'existence de son prix, et ne s'est pas rendu à la cérémonie qui a eu lieu la veille de l'événement en Norvège.
Pékin a également poussé les ressortissants chinois vivant en Norvège à participer à des manifestations hostiles à l'attribution du Nobel. Selon Amnesty international, ils ont reçu depuis le 8 octobre la visite d'officiels ou ont été convoqués à des réunions lors desquelles ils ont reçu la consigne de manifester. Vendredi 10 décembre, une cinquantaine de Chinois ont défilé dans le centre d'Oslo pour protester contre l'attribution du prix Nobel.
Ce 10 décembre, Journée mondiale des droits de l'homme, deux ans, jour pour jour, après la publication de la Charte 08 que Liu Xiaobo a coécrite, la situation de la liberté d'expression en Chine est alarmante. La censure des médias et la répression des autorités chinoises s'intensifient. Les médias étrangers et les dissidents sont sous étroite surveillance. L'immeuble dans lequel Liu Xia, la femme de Liu Xiaobo,est assignée à résidence, est gardé par la police. Les proches du couple et militants des droits de l'homme ne sont plus joignables. Certains, comme les avocats Li Fangping, Teng Biao ont été emmenés hors de Pékin. Zhang Zuhua, coauteur de la "Chartes 08" et défenseur des droits de l'homme, a été enlevé jeudi.
La diffusion de la remise du prix des programmes de télévisions étrangères a été censurée. En Chine, les retransmissions des chaînes CNN, BBC et TV5 ont été interrompues, ainsi que les programmes des chaînes hongkongaises telles que TVB, ATV, HK Cable ou Now (diffusées en hertzien dans la province du Guangdong), laissant place à un écran noir. Les sites Internet de plusieurs médias étrangers, notamment la chaîne norvégienne NRK et la BBC, ont été bloqués pendant plusieurs jours, avant et pendant la cérémonie. Liu Xia, la femme du lauréat, se voit dans l'impossibilité de communiquer avec le monde extérieur. Le réseau Twitter et les appels téléphoniques, moyens par lesquels elle communiquait jusqu'alors, lui ont été confisqués.
Les mots "chaise vide" et "Oslo" sont censurés sur le web en Chine. Sur le site Renren, l'équivalent chinois de Facebook, les mots clés "Oslo", "chaise vide", et "tabouret vide" sont bloqués. Les internautes ont répondu en postant des images de toutes sortes de chaises vides.
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Pour en savoir plus sur Liu Xiaobo et son combat :
Biographie de Liu Xiaobo : http://fr.rsf.org/chine-liu-xiaobo-biographie-28-10-2010,38695.html
Réponses aux détracteurs de Liu Xiaobo : http://fr.rsf.org/chine-reponses-aux-detracteurs-de-liu-07-12-2010,38973.html
Ecrits de Liu Xiaobo : http://fr.rsf.org/les-ecrits-de-liu-xiaobo-01-01-2002,38566.html
Pour soutenir Liu Xiaobo, signez la pétition: http://fr.rsf.org/petition-liu-xiaobo,38700.html
Publié le
Updated on
20.01.2016