Nouvelle instrumentalisation de la justice philippine contre le site Rappler

Reporters sans frontières (RSF) condamne avec la plus grande fermeté la plainte déposée hier par le parquet philippin contre sept membres du conseil d’administration de Rappler, au motif mensonger que le capital du site d’information serait composé d’apports étrangers.

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Actualisation

A l’étranger lors des faits, Maria Ressa a été arrêtée vendredi matin à son arrivée à l’aéroport de Manille, aux Philippines. Elle a été présentée à un tribunal quelques heures plus tard, avant d’être libérée sous caution.

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Les poursuites se succèdent, inexorablement. La directrice de Rappler, Maria Ressa, et six membres du conseil d’administration du site font, depuis hier mercredi 27 mars, l’objet d’une nouvelle plainte déposée par le bureau du procureur général devant le tribunal régional de Prasig, en banlieue de Manille. Ils sont formellement accusés d’avoir violé la loi interdisant à des médias philippins d’être détenus par des capitaux étrangers, ce qui ne repose pourtant sur aucun fait avéré.


“Le harcèlement judiciaire auquel se livrent les différentes agences gouvernementales contre Rappler confine à l’absurde, déplore Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Au total, le site et ses journalistes sont actuellement poursuivis dans pas moins de onze affaires, toutes plus fallacieuses les unes que les autres. Face à une telle instrumentalisation de la justice par le gouvernement pour faire taire les voix qui dérangent, Rappler apparaît comme un pilier de la démocratie qu’il s’agit de défendre à tout prix.”


En plus de Maria Ressa, la plainte déposée hier vise la rédactrice en chef Glenda M. Gloria, ainsi que cinq membres du conseil d’administration du site qui siégeaient en 2016, à savoir  Felicia Atienza, Manuel Ayala, James Bitanga, Nico Jose Nolledo et James Velasquez.


Guerre impitoyable


L’accusation repose sur une décision prise en janvier 2018 par la commission des opérations boursières des philippines, laquelle avait ordonné de révoquer la licence du site au motif que son capital ne serait pas 100% philippin, comme l’exige la Constitution. Une assertion qui ne résiste pas à l’épreuve des faits, comme l’avait rapidement démontré RSF à l’époque, notamment grâce à son étude sur la propriété des médias philippins (Media Ownership Monitor).


Cette décision a été le premier assaut de la guerre absolument impitoyable que l’administration du président Rodrigo Duterte a lancé contre Rappler, symbole d’une information libre et indépendante. Refus d’accès au palais présidentiel, accusations d’évasion fiscale, ou même dépôt de plainte pour diffamation en vertu d’une loi qui n’existait pas au moment des faits…  Les autorités ne reculent devant rien pour intimider les journalistes du site, au point de jeter sa directrice en prison, comme ce fut le cas en février dernier.


Les Philippines se classent à la 133e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2018.

Publié le
Mise à jour le 29.03.2019