Reporters sans frontières (RSF) dénonce l’embargo sur l’information décrété par les autorités de Nauru vis-à-vis des médias étrangers. Alors que la polémique enfle sur les abus dont sont victimes les réfugiés dans son centre de rétention, le gouvernement doit permettre aux journalistes de rendre compte des violations des droits de l’Homme qui y sont commises.
Non contentes de fermer les yeux sur les exactions, dont des viols, perpétrées contre les réfugiés qu’elles abritent pour le compte de l’Australie dans un centre de rétention, les autorités de l’île de Nauru, en plein Pacifique, ont décidé de bloquer toute possibilité d’enquêter sur ce sujet. Dans un mail officiel indiquant qu’aucune demande de visa provenant de médias ne serait approuvée, le bureau de Sydney de la chaîne qatarie
Al Jazeera s’est vu refusé l’entrée de ses journalistes, le 9 octobre dernier.
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Nous exhortons le gouvernement de Nauru à mettre fin à l’embargo qu’il impose aux médias étrangers, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Alors que des témoignages circulent sur de mauvais traitements, notamment des agressions sexuelles, dans le centre de rétention financé par Canberra, des enquêtes journalistiques concernant ces abus sont essentielles. Il est inadmissible que l’Australie, en externalisant la gestion des demandeurs d’asile à grands coups de dollars, parvienne aussi à déléguer la censure et les dispositions discriminatoires à l’encontre des médias. »
Aucun média indépendant n’existant sur l’île de Nauru, il est impératif de laisser les médias étrangers rendre compte de ce qui se passe derrière les portes du centre de rétention, dont la Haute Cour d’Australie examine actuellement la constitutionnalité.
Ce blackout organisé n’est pas la première atteinte portée à la liberté de l’information par le gouvernement de Nauru. En janvier 2014 déjà, celui-ci avait fait passer les
frais de demande d’un visa de journalisme de 200 à 8 000 dollars australiens (environ 5000 euros), soit une augmentation de près de 4000 pour cent !
L’Australie, malgré un rang honorable au Classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières -
25ème sur 180 pays en 2015 - est régulièrement épinglée par l’organisation pour sa politique de bloquage dans l’accès à l’information sur ses demandeurs d’asile. Le 30 juin 2015, le
Border Force Act entrait en vigueur, prévoyant une peine de deux ans d’emprisonnement pour les personnes travaillant dans les centres de rétention de Nauru et de l’île de Manus qui divulgueraient des informations sur les conditions de vie et le traitement des réfugiés.