"Marathoniens, tournez le dos au portrait de Mao Zedong et pensez aux victimes du massacre de juin 1989"

Reporters sans frontières appelle les coureurs du marathon à tourner le dos au portrait de Mao Zedong quand ils s'élanceront le 24 août 2008 de la place Tiananmen de Pékin lors de la dernière épreuve des Jeux olympiques. L'organisation leur demande également d'avoir une pensée pour les milliers d'étudiants et d'ouvriers morts sur la place et dans les avenues qui l'entourent les 4 et 5 juin 1989 lors de la répression par les autorités chinoises des manifestations démocratiques. "La propagande officielle veut que Mao Zedong soit le père de l'indépendance retrouvée de la Chine, mais il n'en reste pas moins l'un des pires dictateurs du XXe siècle. Le régime totalitaire qu'il a imposé à la Chine, notamment au cours de la période sombre de la Révolution culturelle, a provoqué la mort de dizaines de millions de Chinois, dont nombre de journalistes et écrivains. Mao Zedong haïssait les intellectuels et il a asservi la presse à des fins de propagande et de culte de la personnalité. Son portrait sur la place Tiananmen est une insulte au respect de la dignité humaine proclamée dans la Charte olympique", a affirmé l'organisation. "La place et les avenues que les marathoniens vont fouler dimanche ont également été le théâtre du massacre du 4 juin 1989 au cours duquel les forces de sécurité chinoises ont tué des milliers d'étudiants et d'ouvriers qui manifestaient depuis des semaines en faveur de la démocratie. Le gouvernement chinois impose toujours une censure très stricte sur ces événements, et plusieurs journalistes et dissidents sont emprisonnés pour les avoir évoqués publiquement", a ajouté l'organisation. Reporters sans frontières rappelle qu'un journaliste, Yu Donguye, est devenu fou après avoir été emprisonné de 1989 à 2006. Avec deux amis, il avait lancé des coquilles d'œuf remplies de peinture rouge sur le portrait de Mao Zedong sur la place Tiananmen. Les tortures et les longues périodes d'isolement l'ont brisé physiquement et psychologiquement. Mao Zedong, prédateur de la liberté d'expression En 1957, la répression contre les "droitiers" menée par Mao Zedong a fait des milliers de victimes dans les milieux intellectuels, dont des dizaines de journalistes. Pour la seule ville de Shanghai, 80 000 personnes ont été arrêtées et envoyées dans des camps de travail. Moins de dix mille sont revenus vivants. Lors des commémorations du cinquantième anniversaire de cet événement, en 2007, le Parti a censuré de nombreux débats sur le sujet. L'un des journalistes victimes du maoïsme est Liu Binyan, très respecté dans les années 1950, qui a passé 18 ans dans un camp de rééducation pour des articles jugés contraires aux intérêts du parti maoïste. En 2005, à sa mort en exil, les médias chinois n'ont publié aucune information. L'auteur du "Cauchemar des mandarins rouges" avait demandé au gouvernement de Pékin de pouvoir revenir sur sa terre natale pour y finir ses jours. Pendant la période qui a précédé la Révolution culturelle, l'expression était un peu plus libre. Ainsi, Wu Han, l'auteur d'une pièce de théâtre critiquant l'empereur, a suscité un engouement dans le public. La liberté d'expression a ensuite été réduite à néant. Pendant les années totalitaires de la Révolution culturelle, le Quotidien du peuple et le magazine Drapeau rouge, contrôlés par les maoïstes de la Bande des quatre, étaient totalement dévoués à l'agitation des masses. Les autres médias devaient suivre la ligne sans aucune possibilité de critiquer le président Mao Zedong. Ce n'est qu'en septembre 1976 à la mort du dictateur et après le limogeage de la Bande des quatre que la presse chinoise a été autorisée à s'émanciper du dogme maoïste, mais pas de la ligne du Parti communiste. Le système actuel de contrôle des médias est l'héritage de l'époque maoïste, illustré notamment par le tout-puissant Département de la propagande.
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Updated on 20.01.2016