Les propos inquiétants de Rema FM, une radio privée proche du pouvoir
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Alors que plusieurs organisations locales de défense des droits de l'homme et de journalistes du Burundi ont adressé, le 8 juin dernier, une lettre conjointe au Conseil national de la Communication (CNC) condamnant l’attitude de la radio privée Rema FM, Reporters sans frontières s'étonne que le CNC n'ait pas encore daigné répondre. L'élection présidentielle du 28 juin se prépare dans un climat tendu et le ton employé sur les ondes de cette radio est très inquiétant.
"Nous sommes surpris par le silence du Conseil national de la Communication face à l'alerte qui lui a été adressée par les organisations locales de journalistes. Leur requête doit être prise au sérieux tant les propos de Rema FM sont graves et assimilables à ceux d'un média de la haine. Alors que le pays traverse une période d'instabilité, marquée par des troubles politiques importants, il est du devoir de l'organe de régulation de réagir et de sanctionner sévèrement les responsables de ces propos", a déclaré l'organisation.
Depuis quelques semaines, certaines émissions de la radio contiennent des propos en effet très agressifs. Reporters sans frontières, qui s'est procuré plusieurs enregistrements, en publie des extraits :
"Les partis politiques d'opposition au Burundi tentent de déstabiliser le pays et agitent la population (…). Ils n'ont aucune preuve de la fraude électorale qu'ils dénoncent. Ils doivent arrêter de dénigrer la population, qui reste le grand juge de ces élections", a déclaré le présentateur dans une émission diffusée le 6 juin dernier, avant de révéler l'identité et l'adresse de personnes désignées comme des opposants politiques.
"Les Burundais devraient plutôt voir clair dans cette entreprise crapuleuse pour éviter de tomber dans le désastre passé (…) A bon entendeur, salut ! ".
"Les partis contestataires seraient en train de se préparer à perturber la sécurité par le biais de leur jeunesse affiliée (…), le début de leur sale besogne est fixé au lundi 7 juin prochain."
Dans l'émission du 8 juin 2010, les journalistes s'en prenaient directement à la correspondante au Burundi de Human Rights Watch, par ailleurs expulsée, l'accusant de manipuler les responsables de l'opposition : "La représentation de HRW est assurée de manière omniprésente par une seule femme, et celle-ci n'entend pas désarmer ses manœuvres d'incrimination contre les hauts cadres de l'armée et de la police burundaise dans les cas de meurtres perpétrés dans notre pays. (…) Elle n'entend pas désarmer sa campagne de diabolisation (...) et manipule certains responsables des associations locales ainsi que les leaders politiques de l'opposition (…)". Avant de conclure : "C'est une affaire à suivre."
La situation politique actuelle au Burundi est extrêmement tendue. Le 28 juin prochain, se tiendra l'élection présidentielle qui verra la réélection, sans surprise, de l'unique candidat Pierre Nkurunziza, président sortant. En effet, les treize candidats de l'opposition se sont retirés du processus après avoir dénoncé les irrégularités commises lors des élections communales du 24 mai dernier. Voir communiqué précédent .
Le 24 juin 2010, le président de la Commission de l'Union africaine, Jean Ping, a annoncé sa "grande préoccupation" sur les récents développements politiques au Burundi tandis que le lendemain, l'expert indépendant auprès des Nations Unies, Akich Okola, a lancé un avertissement sur les violations des droits de l'homme autour de l'élection présidentielle.
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Updated on
20.01.2016