Les commentaires sur le site Internet du groupe de presse Iwacu suspendus par le CNC
Organisation :
Reporters sans frontières est préoccupée par la décision prise par le Conseil national de la communication (CNC, organe de régulation) de suspendre pour trente jours les commentaires des internautes sur le site Internet du groupe de presse Iwacu, www.iwacu-burundi.org.
"Cette décision est un précédent. Jusqu'à présent, le CNC n'avait jamais pris de sanction contre un site Internet, encore moins contre un forum en ligne. N'est-il pas plus approprié de débattre des commentaires censés poser problème plutôt que de suspendre l'ensemble d'un forum? Nous craignons que surgisse avec cette décision une nouvelle forme de contrôle sur les médias et l'expression libre des opinions", a déclaré l'organisation, qui ne conteste pas en soi la nécessité de modérer certains propos d'internautes.
Interrogé par Reporters sans frontières, le président du CNC, Pierre Bambasi, a affirmé : "Nous ne censurons pas le site Internet, qui est bon, mais simplement les commentaires. La mesure que nous prenons est beaucoup plus un signal pédagogique qu'autre chose. Les internautes doivent savoir que nous lisons ce qu'ils écrivent."
"Nous savons cependant que le travail du modérateur n'est pas facile. Iwacu nous a dit recevoir environ 4000 messages et n'en publier que 1500. Mais cela ne suffit pas. Nous ne pouvons tolérer que des individus ou des groupes s'invectivent sur Internet, agitent les haines ethniques, parlent de manipulation d'armes, et appellent les gens à se soulever", a-t-il ajouté.
Dans sa décision n°100/CNC/004/2013 du 30 mai 2013, dont Reporters sans frontières a obtenu une copie, le CNC estime que des commentaires d'internautes en dates des 28 et 29 mai 2013 "violent les prescrits des articles 10 et 50 de la Loi régissant la presse en ce qui concerne l'atteinte à l'unité nationale, l'ordre et la sécurité publique, l'incitation à la haine ethnique, l'apologie du crime et des outrages au chef de l'Etat."
Une version contestée par le directeur des publications du groupe Iwacu, Antoine Kaburahe, ainsi que l'administrateur du site, Roland Rugero.
"Nous sommes allés au CNC cette semaine pour expliquer comment nous gérons les commentaires sur notre forum. Bien entendu il peut y en avoir qui échappent dans un premier temps à notre vigilance, mais dès que nous en sommes avertis, nous les supprimons. Ces derniers jours, avec l'actualité sur l'expulsion d'une famille de son logement, la restitution des biens perdus en 1972, et les événements de Gatumba, il est inévitable que des commentaires évoquent les questions ethniques. Mais nous sommes très attentifs et nous supprimons tout ce qui n'est pas acceptable", a confié Roland Rugero à RSF.
Antoine Kaburahe : "Depuis cinq ans que notre site fonctionne, les commentaires sont gérés avec professionnalisme. Nous n'avons jamais eu aucun problème. Le CNC aura du mal à prouver notre prétendue mauvaise foi ou notre capacité de nuire vu la masse de commentaires qui passent à la poubelle. Nous regrettons sa décision mais nous allons obtempérer et l'appliquer. Comme nous ne dissocions pas le forum et le site, nous décidons de suspendre l'ensemble de notre site."
Lire le communiqué de presse d'Iwacu sur la suspension de son site Internet, ici. Le groupe tient une conférence de presse à la Maison de la Presse de Bujumbura ce 31 mai 2013, à 16 heures.
En savoir plus sur la liberté de la presse au Burundi :
Communiqués de presse de RSF.
Fiche pays.
Publié le
Updated on
20.01.2016