“Il est navrant de devoir rappeler que le choix des envoyés spéciaux n'appartient pas aux autorités, mais aux seules rédactions”, a déclaré Reporters sans frontières. L'organisation estime que l'expulsion de Ghislaine Dupont s'apparente à un règlement de comptes.
Reporters sans frontières est profondément déçue par la décision des autorités congolaises d'expulser, le 3 juillet 2006, l'envoyée spéciale de la station publique française Radio France Internationale (RFI), Ghislaine Dupont.
“Il est navrant de devoir rappeler que le choix des envoyés spéciaux n'appartient pas aux autorités, mais aux seules rédactions. L'intransigeance du gouvernement congolais, qui a utilisé des prétextes infondés pour motiver sa décision, est incompréhensible. Nous déplorons notamment le fait que ni la présidence de la République ni le ministère de l'Information n'aient répondu aux appels des organisations de défense de la liberté de la presse. Dans ces conditions, l'expulsion de Ghislaine Dupont s'apparente à un règlement de comptes et constitue une atteinte grave à la liberté de la presse”, a déclaré Reporters sans frontières.
Ghislaine Dupont a embarqué à Kinshasa à bord d'un vol pour Bruxelles, dans la soirée du 3 juillet, après que la Direction générale des renseignements et services spéciaux (DGRS) de la police congolaise lui avait notifié oralement son expulsion du territoire congolais. Installée en République démocratique du Congo (RDC) depuis avril 2006 avec un visa de travail de journaliste, elle n'avait jamais reçu l'accréditation réclamée par le ministère de la Presse et de l'Information. Elle était par ailleurs détentrice d'une accréditation délivrée par la Mission des Nations unies au Congo (Monuc). Comme d'autres journalistes occidentaux en RDC, dans l'attente de la décision du ministère, Ghislaine Dupont avait commencé à couvrir la campagne électorale, entamée le 29 juin.
Les conditions de délivrance des accréditations par le ministère de la Presse et de l'Information sont aléatoires. Les services compétents perçoivent des commissions en liquide qui varient selon les journalistes et peuvent aller d'une quinzaine à plusieurs centaines de dollars. Le reçu qui leur est fourni, sur la base d'informations parfois fantaisistes, est une feuille volante, sans cachet ou nom de fonctionnaire, et sans aucune valeur juridique. Par ailleurs, l'accréditation exigée par le ministère n'a pas de fondement légal. Pour pouvoir exercer la profession de journaliste en RDC, seul un visa de travail professionnel est requis par la loi. Cette accréditation du ministère n'est qu'une convention sans base juridique.
En mars 2006, Ghislaine Dupont, qui couvre l'actualité de la RDC depuis plusieurs années, avait été la cible d'une violente lettre de protestation du ministre de la Presse et de l'Information, Henri Mova Sakanyi, qui avait comparé RFI à la Radiotélévision libre des mille collines (RTLM), la station des génocidaires hutus rwandais.