Le reporter indien Isravel Moses tué à cause de son statut de journaliste
Correspondant pour une chaîne de télévision basée dans le Tamil Nadu, en Inde du sud, Isravel Moses a été visé après avoir été désigné à la vindicte de la pègre locale par ses voisins en raison de son statut de journaliste. Reporters sans frontières (RSF) rappelle l'urgence d’une loi pour la protection des journalistes pour répondre à ce type de situation.
Son statut de journaliste lui a coûté la vie. Le reporter Isravel Moses, qui travaillait pour la chaîne tamoulophone Tamizhan TV, a été tué à coups de machettes dans la soirée du dimanche 8 novembre, dans sa localité de Kundrathur, en banlieue de Madras, dans le sud-est de l’Inde.
Une semaine avant ce drame, Isravel Moses avait notamment réalisé une enquête sur un trafic de cannabis par la pègre locale, ce qui pourrait expliquer le mobile de sa mort. “Il est possible que ce soit lié”, avance le père du reporter, Gnanaraj Jesudasan, lui-même journaliste de presse écrite.
Interrogé au téléphone par RSF, il estime toutefois que “l’assassinat [de son fils] n’est pas directement lié à une enquête ou un reportage qu’il aurait diffusé”. En réalité, le journaliste et sa famille habitaient à proximité d'un terrain qui a fait l’objet d’une expropriation par un gang mafieux, dont les membres y ont déposé des pierres en vue d'un chantier.
Expédition punitive
Après que des riverains ont retiré ces pierres, des membres du gang ont fait une descente pour punir les fautifs. “Bien qu’il n’y soit pour rien, les villageois ont désigné mon fils comme instigateur, en pensant que son statut de journaliste allait lui permettre d’être épargné”, soupire Gnanaraj Jesudasan.
Au final, lors de l’expédition punitive de dimanche soir, c’est justement ce statut de journaliste qui a entraîné la mort d’Isravel Moses. Avant cela, ce dernier avait averti les policiers que des menaces pesaient sur lui. Quatre individus ont été arrêtés depuis son meurtre.
“Nous appelons le parquet du Tamil Nadu a faire en sorte que les exécutants et les instigateurs du meurtre d’Isravel Moses soient traduits comme il se doit devant un tribunal,” déclare Daniel Bastard, responsable du bureau Aise-Pacifique de RSF.
“Il n'est pas tolérable qu’un journaliste soit assassiné quand bien même la police savait que des menaces pesaient sur sa sécurité. Nous appelons le gouvernement du Tamil Nadu à déposer un projet de loi sur la sécurité des journalistes dans les plus brefs délais pour que ce type d’accident ne se renouvelle pas.”
Deuxième journaliste tué en 2020
Isravel Moses est au moins le deuxième journaliste indien assassiné en lien avec travail en 2020. Le reporter Shubham Mani Tripathi a succombé à ses blessures le 19 juin dernier, après avoir été abattu de six balles, dont trois en pleine tête, en banlieue de Lucknow, la capitale de l’Uttar Pradesh, en Inde du Nord.
Il avait un peu plus tôt fait part de ses craintes d’être assassiné en raison d’enquêtes qu’il menait sur des cas d’expropriations illégales en lien avec la mafia du sable.
L’Inde se situe à la 142e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2020 par RSF.