Le New York Times obligé de fournir les relevés téléphoniques de deux de ses journalistes : un revers de plus pour le secret des sources

Reporters sans frontières regrette la décision de la Cour suprême qui a refusé, le 27 novembre 2006, de suspendre l'application d'une décision de la justice fédérale obligeant deux journalistes du New York Times à livrer leurs relevés téléphoniques. Cette décision constitue un revers de plus pour le secret des sources.

Reporters sans frontières regrette vivement la décision de la Cour suprême qui a refusé, le 27 novembre 2006, de suspendre l'application d'une décision de la justice fédérale obligeant le New York Times à livrer les relevés téléphoniques de deux de ses journalistes. L'organisation réitère son appel au Congrès pour le vote d'une loi (“federal shield law”) protégeant le secret des sources. “La décision de la Cour suprême signe un nouveau revers pour le secret des sources. La justice et l'administration fédérale peuvent toujours brandir l'argument de la sécurité nationale pour forcer des journalistes à livrer leurs relevés téléphoniques, on voit mal en quoi le respect du secret professionnel menacerait, en l'occurrence, la sécurité intérieure du pays. Cette décision est injuste et dangereuse, et nous ne nous faisons guère d'illusion quant à l'issue du pourvoi que compte former le New York Times devant la Cour suprême sur le fond de l'affaire. Il est donc impératif que le Congrès, sorti des urnes le 7 novembre, mette à son agenda le vote d'une loi protégeant le secret des sources au niveau fédéral”, a déclaré Reporters sans frontières. Peu après les attentats du 11 septembre 2001, Judith Miller et Philip Shenon, du New York Times, avaient enquêté sur deux associations caritatives musulmanes soupçonnées par le FBI de liens avec le terrorisme. Les journalistes avaient notamment appris, de sources confidentielles, que le gouvernement comptait geler les avoirs de ces associations, et avaient contacté ces dernières pour recueillir leur réaction. Le ministère de la Justice avait aussitôt cherché à déterminer l'origine des fuites. Le 24 février 2005, le juge new-yorkais, Robert W. Sweet, s'appuyant sur la législation de l'Etat de New York et sur le premier amendement de la Constitution, avait donné gain de cause aux deux journalistes. Le procureur Patrick Fitzgerald avait porté l'affaire au niveau fédéral un an plus tard. Le 1er août 2006, la cour d'appel fédérale de Manhattan a estimé que la protection du secret des sources par les journalistes n'était pas garantie par le premier amendement et ordonné que le New York Times livre à un grand jury, chargé d'enquêter sur les fuites dans l'enquête sur les associations musulmanes, les relevés téléphoniques de Judith Miller et Philip Shenon. Le quotidien a, dès lors, saisi la Cour suprême pour que l'application de cette décision soit suspendue. La Cour suprême a répondu par la négative le 27 novembre. Condamnée pour avoir refusé de livrer ses sources dans une autre affaire, Judith Miller avait purgé douze semaines de prison, entre le 6 juillet et le 29 septembre 2005. Elle a, depuis, quitté le New York Times.
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Updated on 20.01.2016