La presse indépendante victime de nouvelles attaques

Lors d'une réunion du Conseil de sécurité de la République kirghize, le 23 octobre 2004, le président Askar Akaiev a fustigé les médias indépendants et les organisations de défense des droits de l'homme, les accusant d' "extrémisme idéologique". Par ailleurs, l'hebdomadaire MSN, l'un des plus importants journaux indépendants du pays, une fois de plus dans la ligne de mire des autorités, fait l'objet de poursuites émanant de la direction anti-monopole du ministère du Développement économique. Dans un courrier adressé au président Askar Akaiev, Reporters sans frontières s'est inquiétée des amalgames qui peuvent être faits au nom de la sécurité nationale. L'organisation a demandé au chef de l'Etat de veiller à ce que la lutte contre le terrorisme ne soit pas utilisée comme prétexte pour museler les voix indépendantes, nécessaires à l'établissement d'une véritable démocratie. Par ailleurs, Reporters sans frontières a demandé à M. Askaiev de "veiller à l'application stricte de la loi sur la concurrence". Lors de la réunion du Conseil de sécurité, le 23 octobre, consacrée à la lutte contre la corruption et le terrorisme, Askar Akaiev a dénoncé le grand danger que représente le "terrorisme idéologique" pour le pays. Selon lui, "les médias, groupes et organisations participant au combat politique" prennent part à cet "extrémisme idéologique". "La propagation agressive" de leur "compréhension subjective du développement du pays et de la démocratie" ne vise, d'après le Président, qu'à déstabiliser le pays. "Certaines publications, qui se font appeler journaux d'opposition, utilisent le moindre prétexte pour aggraver la situation et transforment leurs pages en manuel de déstabilisation", a-t-il ajouté. Le président Akaiev a affirmé qu'au Kirghizistan, "personne n'est en prison pour ses idées". Un hebdomadaire indépendant de nouveau menacé Par ailleurs, l'hebdomadaire MSN fait l'objet de poursuites de la part de la direction anti-monopole du développement économique, qui l'accuse d'enfreindre la loi sur la concurrence en exerçant un monopole par dumping. Le 29 septembre, la direction anti-monopole a publié un arrêté sommant l'hebdomadaire indépendant de cesser de vendre le journal "en dessous du prix de production". Le 5 octobre, le ministère a fait savoir aux responsables de MSN qu'ils disposaient de sept jours pour se conformer à cette décision et augmenter le prix du journal. Pourtant, selon l'article 3 de la loi sur les médias, les revenus des journaux proviennent non seulement de leurs ventes, mais aussi d'autres services, de sponsors, etc. Le prix d'achat du journal dépend alors d'une décision interne de la rédaction. Selon Rina Prijivoit, rédactrice en chef adjointe du journal, MSN n'exerce en aucun cas une position de monopole sur le marché de la presse. Elle a indiqué que la rédaction ferait appel de cette décision. En 2003, MSN, alors publié sous le nom de Moya Stolitsa-Novosti, avait fait l'objet d'un acharnement juridique et administratif. Le 11 juin, Alexandre Kim, rédacteur en chef de Moya Stolitsa-Novosti, avait annoncé la fermeture du journal pour cause de banqueroute. Le quotidien, qui dénonçait régulièrement la corruption de la classe politique, avait été condamné, au terme de plus de trente procès, à payer plus de 77 000 euros de dommages et intérêts ou d'amendes. Il avait cessé sa parution fin mai après la saisie de 15 000 exemplaires contenant des articles sur le gendre du Président et le harcèlement juridique subi par le journal. Le 20 janvier 2004, le tribunal de Lénine, à Bichkek, avait ordonné la saisie des biens et le gel des comptes du quotidien. La rédaction était cependant parvenue à enregistrer le journal sous un nouveau nom, MSN.
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Updated on 20.01.2016