Interpellations, menaces et entraves à la liberté de la presse au Sud Waziristan

Ces quatre derniers jours, au moins quatre journalistes ont été interpellés, un stringer de la BBC World Service a été menacé et des reporters de Peshawar ont été empêchés d'entrer dans les zones tribales. Depuis le début de la nouvelle offensive de l'armée pakistanaise à la frontière avec l'Afghanistan, notamment dans la région de Shakai, Reporters sans frontières a constaté une augmentation importante des restrictions à la liberté de la presse. L'opinion publique pakistanaise et internationale est en droit de savoir ce qui se passe dans les zones tribales. Il n'est pas acceptable que l'armée impose un black-out de l'information et interpelle ou menace les journalistes qui font leur travail dans des conditions difficiles. "Nous sommes conscients des impératifs de sécurité qu'exigent les opérations militaires en cours, mais Reporters sans frontières estime que les journalistes pakistanais et étrangers doivent avoir un minimum accès aux zones de conflit", a écrit l'organisation dans une lettre au porte-parole des forces armées (ISPR), le général Shaukat Sultan. Les autorités pakistanaises ont interpellé pendant quelques heures, le 12 juin 2004, quatre correspondants de presse dans le Sud Waziristan. Allah Noord Wazir du quotidien The Nation, Amir Nawab Khan du quotidien The Frontier Post, Mujeebur Rehman du quotidien Khabrian et un quatrième reporter non identifié tentaient de rejoindre la région de Shakai où une opération d'envergure a été lancée par l'armée pakistanaise contre des combattants islamistes dont certains liés à Al-Qaida. Mujeebur Rehman, également stringer de plusieurs chaînes de télévision étrangères, a indiqué que l'armée avait confisqué sa caméra et cassettes vidéo, ainsi que celles de ses confrères. Dilawar Wazir, stringer de la radio BBC World Service, a repris cette information à l'antenne. Il a ensuite été menacé par un fonctionnaire de Wana (capitale du Sud Waziristan) selon lequel les journalistes qui tenteraient d'aller dans la région de Shakai devraient faire face à de "sérieux problèmes." L'armée pakistanaise aurait transmis aux autorités locales l'ordre d'empêcher la presse d'atteindre cette zone où se déroulent les combats les plus violents. Le général Shaukat Sultan a confirmé cette mesure prise pour des "raisons de sécurité". Par ailleurs, plusieurs journalistes de Wana ont confirmé à Reporters sans frontières que les officiels refusaient de les informer de la situation sur le terrain. Le 13 juin, l'administration de la zone tribale Agence Khyber a refusé aux journalistes de Peshawar l'accès aux zones tribales. La presse souhaitait couvrir une assemblée traditionnelle convoquée par le parti islamiste pakistanais Jamaat-e-Islami pour condamner les opérations militaires et les sanctions contre les tribus pachtounes. Un officiel, entouré de dizaines de paramilitaires pakistanais, a affirmé avoir reçu l'ordre du gouverneur de ne pas laisser passer les journalistes. Il a menacé d'utiliser la force si la presse tentait d'entrer en zones tribales sans autorisation. Depuis mars 2004, l'armée pakistanaise a imposé des restrictions importantes, notamment aux journalistes étrangers, dans la couverture des opérations militaires contre la présence de combattants d'Al-Qaida ou islamistes dans les zones tribales pachtounes. Au moins une dizaine de journalistes ont été arrêtés depuis cette date.
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Updated on 20.01.2016