"Les journalistes indépendants faisant leur métier avec sérieux pour informer leurs concitoyens sur la situation politique actuelle ne sont ni des manifestants ni des acteurs de la crise. Dans ce climat politique très tendu, il est primordial qu'ils soient protégés", a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières, après la suspension de parution de cinq journaux et plusieurs agressions et menaces sur des journalistes.
Reporters sans frontières exprime son inquiétude renouvelée après la suspension de parution de cinq journaux et les agressions et menaces dont plusieurs journalistes ont été victimes au cours de ces dernières semaines. Depuis le début du bras de fer politique opposant le président de la République, Marc Ravalomanana, et le maire déchu d'Antananarivo, Andry Rajoelina, l'organisation déplore une prise en otages des médias et un climat défavorable à la liberté de la presse.
"Les journalistes indépendants faisant leur métier avec sérieux pour informer leurs concitoyens sur la situation politique actuelle ne sont ni des manifestants ni des acteurs de la crise. Dans ce climat politique très tendu, il est primordial qu'ils soient protégés. Dans le même temps, nous demandons aux journalistes des médias proches du Président ou de son principal opposant de ne pas verser dans la propagande partisane ou la diffamation, mais au contraire de faire preuve du plus grand professionnalisme en fournissant des informations vérifiées et objectives", a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières.
Le 10 mars 2009 vers 13 heures, Christian Rivo Rakotonirina, ancien rédacteur en chef du quotidien Tribune de Madagascar et désormais rédacteur en chef d'un journal en ligne, a été pris à partie, lors d'un meeting au stade Mahamasina d'Antananarivo, par des partisans du président Ravalomanana qui l'accusaient de téléphoner à Andry Rajoelina. Dépouillé de son téléphone Blackberry, il a ensuite été passé à tabac et se trouvait dans le coma lorsqu'il a été transporté à l'hôpital HJRA (CHU Joseph Ravoahangy Andrianavalona). "Mon mari se trouve dans le service de neurologie. Il est désormais conscient et hors de danger, mais mal en point. Le dernier scanner a décelé un hématome frontal", a confié la femme du journaliste à Reporters sans frontières.
Le même jour, Tiaray Rakoto, journaliste de Inona Ny Vaovao? (Quelles nouvelles?), un quotidien appartenant au président de la République, a été poursuivi, fouillé et dépouillé de son argent par des militants pro-Andry Rajoelina. Le journaliste a réussi à cacher son matériel avant que ses assaillants ne s'approchent de lui. Depuis ces deux incidents, Tribune de Madagascar et Inona Ny Vaovao? ont décidé de cesser de paraître "jusqu'à nouvel ordre".
Par ailleurs, suite à des menaces d'incendie criminel proférées à l'encontre du groupe de presse Midi Madagascar, propriété du député de la majorité Mamy Rakotoarivelo dont la maison a été pillée le 11 mars, les quotidiens Midi Madagascar et Gazetiko et l'hebdomadaire Midi Flash ont cessé de paraître.
Toujours dans la capitale, le 7 mars vers 14 heures 30, Sitraka Rafanomezantsoa, journaliste du quotidien Malaza, a été agressé par des "casseurs de manif", un terme utilisé localement pour désigner les partisans du Président. Joint au téléphone par Reporters sans frontières, le journaliste a accusé des "gros bras" de l'avoir frappé à coups de gourdins et de barres de fer. Il s'en est tiré avec deux hématomes à la tête et l'arcade sourcilière ouverte.
Des incidents similaires se sont également produits en province. A Tamatave, une localité de la côte est de l'île, lors d'une manifestation de l'opposition organisée le 19 février, les forces de l'ordre ont tenté d'arracher la caméra d'un journaliste reporter d'images prénommé Harilala, travaillant pour la chaîne de télévision TV Plus. Brièvement interrogé par la police, le journaliste a ensuite été relâché. Quelques jours auparavant, à Fianarantsoa (Sud-Est), Nicolas Rabemananjara, directeur de TV Plus, a été menacé verbalement par des agents de police qui lui ont intimé l'ordre d'arrêter de filmer une manifestation de l'opposition.