Inde : le reporter Parag Bhuyan tué dans une attaque à la voiture-bélier

Basé dans le nord-est du pays, le journaliste s’était fait une réputation en enquêtant sur les différentes activités criminelles qui ont cours dans son district, et avait récemment reçu des menaces. Reporters sans frontières appelle les autorités régionales à tout mettre en œuvre pour que son assassinat ne reste pas impuni.

Le choc a été tel qu’il a été projeté à plus de six mètres. Le journaliste Parag Bhuyan a été violemment fauché par une voiture devant son domicile, dans la soirée du 11 novembre vers 20 h 10. Reporter pour le groupe de presse Pratidin Time, et pour le quotidien Axomiya Khabar, dans l’Etat de l’Assam, dans le nord-est de l’Inde, il a succombé à ses blessures le lendemain matin à l’hôpital.


Dans un communiqué, le rédacteur en chef du Praditin Time, Nitumoni Saikia, a assuré qu’il s’agissait là d’un “assassinat prémédité”, vraisemblablement en représailles aux enquêtes que Parag Bhuyan avait réalisées sur la corruption locale ou les différentes activités criminelles qui ont cours dans son district de Tinsukia.


Et pour cause, les conditions de sa mort laissent peu de place à l’hypothèse d’un accident : “La route était vide, et il discutait avec un confrère sur le bord. Le véhicule a délibérément visé Parag, l’a percuté et a pris la fuite”, révèle Mrinal Talukdar, consultant éditorial du Praditin Time, interrogé par RSF.


Selon lui, le reporter avait reçu des menaces de la part de membres de la pègre locale. “Son frère nous a dit que des trafiquants de bois précieux l'avaient récemment approché pour qu’il cesse d’enquêter sur la question. Mais il a refusé d'écouter, insistant qu’il ne faisait que son travail.”


Deux journalistes tués en quatre jours


“Tous les éléments en présence laissent penser que Parag Bhuyan a été assassiné en raison des reportages qu’il a réalisés, déclare Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-pacifique de RSF. Nous appelons le Premier ministre de l’Assam, Sarbananda Sonowal, à veiller à ce que les commanditaires de ce meurtre atroce soient traduits devant la justice. Nous invitons également son gouvernement à engager une réflexion pour déposer un projet de loi sur la protection des journalistes, afin que ceux-ci puissent enquêter sur les activités mafieuses sans craindre pour leur vie.” 


Parag Bhuyan avait récemment réalisé des enquêtes sur l’exploitation illégale de mines, sur le commerce de bois précieux ou sur du trafic de bétail. Son dernier reportage portait sur l’agression d’un officier de police par un leader politique du Bharatiya Janata Party (BJP), le parti au pouvoir en Inde et dans l’Etat de l’Assam.


Le décès de Parag Bhuyan intervient quatre jours après celui d’Isravel Mosestué à coups de machettes dans la soirée du dimanche 8 novembre, en banlieue de Madras, dans le sud-est de l’Inde. Il a été visé après avoir été désigné à la vindicte de la pègre locale par ses voisins en raison de son statut de journaliste.


L’Inde se situe à la 142e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2020 par RSF.

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Mise à jour le 16.11.2020