Facebook et des sites d’information bloqués par décision des autorités

Reporters sans frontières condamne très fermement la brutale escalade de la cybercensure mise en place par le gouvernement tadjik. Depuis le 2 mars 2012, une dizaine de fournisseurs d’accès à Internet (FAI) locaux ont reçu l’ordre de bloquer l’accès au réseau social Facebook et à quatre sites d’information indépendants. « Un an et demi après le dernier épisode de ce type, les autorités tadjikes renouent donc avec la cybercensure massive, a déclaré Reporters sans frontières. Cette vaste opération de blocage est tout aussi inacceptable qu’absurde. » Depuis le 3 mars au matin, il est généralement impossible d’accéder au réseau social Facebook, au portail d’analyse géopolitique russe Poliarnaïa Zvezda (Etoile polaire), au site d’information politique en exil Tjknews.com, au portail d’information ouzbek Maxala.org et au site spécialisé sur l’Asie centrale Centrasia.ru. Le chef du service des Télécommunications, Beg Zukhurov, a déclaré le 5 mars qu’aucun ordre n’avait été donné aux FAI et qu’il s’agissait de « problèmes techniques ». Mais la presse locale a fini par obtenir une copie de la lettre officielle qu’ont bel et bien reçu les principaux FAI : signée par un adjoint de Beg Zukhurov, celle-ci leur enjoint de « bloquer l’accès » aux cinq sites précités, « en relation avec des travaux techniques préventifs ». D’après les informations recueillies par Reporters sans frontières, Poliarnaïa Zvezda aurait été le premier à être censuré, dès le 2 mars au soir. Ceci accrédite l’idée défendue par plusieurs commentateurs, selon laquelle le blocage ferait suite à la publication sur ce site d’un article intitulé « Le Tadjikistan à la veille d’une révolution », très critique à l’égard du système mis en place par le chef de l’Etat, Emomali Rakhmon. Les autres sites indépendants auraient été bloqués à mesure qu’ils reprenaient et republiaient l’article incriminé. Le premier site d’information russophone sur l’Asie centrale, Fergananews.com, a appris avec surprise à cette occasion qu’il était aussi partiellement bloqué depuis plusieurs jours dans le pays. Le blocage de Facebook semble d’autant plus absurde que le réseau rassemble près de 35 000 utilisateurs au Tadjikistan, contre plus de 150 000 et 100 000 respectivement pour les réseaux sociaux russophones Moï Mir et VKontakte. Mais le 7 mars, le Parti démocratique du peuple, au pouvoir, a annoncé son intention de lancer un nouveau réseau social alternatif. Ce qui n’est pas sans rappeler la création récente, par les autorités ouzbèkes, du réseau social national expurgé et surveillé, Muloqot.uz. Filtrage général et volonté de rabattre les internautes vers des réseaux sociaux ‘nationaux’ se banalisent de façon extrêmement préoccupante en Asie centrale, de même que la référence à un Internet morcelé en segments nationaux soumis à des normes aléatoires au nom de la ‘sécurité’ et des ‘valeurs locales’. Le 23 septembre 2011, le Tadjikistan avait présenté devant l’Assemblée générale de l’ONU un projet de résolution pour l’adoption d’un « code de bonne conduite sur Internet », également soutenu par la Chine, la Russie et l’Ouzbékistan. Il visait essentiellement à soumettre le libre flux de l’information aux normes locales et aux impératifs prépondérants de l’Etat. (Photo: Dieter Nagl / AFP)
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Updated on 20.01.2016