Deuxième jour de la visite de Jacques Chirac : du matériel vendu par EADS à la police de Pékin servira à la répression

Alors que Jacques Chirac se rend à Wuhan, place forte des investissements économiques français en Chine, Reporters sans frontières attire son attention sur le fait que la société européenne de défense et d'aéronautique EADS, dont le coprésident exécutif, Louis Gallois, accompagne le chef de l'Etat, est en passe de devenir le principal fournisseur d'équipements de communication et de surveillance de la police de Pékin, dans le cadre des Jeux olympiques de 2008. "Comme l'entreprise française Thalès qui n'a pas hésité à vendre aux autorités chinoises des antennes permettant d'intensifier le brouillage des radios internationales, EADS signe des contrats avec la police chinoise, sans aucune précaution. Le matériel d'EADS pourrait être utilisé pour la répression politique avant, pendant et après les JO. Pékin justifie la répression actuelle contre les voix dissidentes par la nécessité d'organiser des Jeux sûrs. De son côté, EADS tente de gagner des parts du marché de la sécurité estimé à plusieurs milliards d'euros. Il est urgent que les autorités françaises, actionnaires d'EADS, prennent position sur ce dossier", a affirmé Reporters sans frontières. Au vu des derniers rapports des Nations unies, notamment sur l'usage régulier de la torture par la police, il est inacceptable qu'une entreprise européenne puisse vendre sans restrictions du matériel aux forces de l'ordre. L'Union européenne devrait réfléchir à la manière d'interdire la vente de ces produits dans le cadre de l'embargo sur les armes, décrété après le massacre de la place Tiananmen de 1989. Les projets d'EADS semblent se faire avec le soutien des autorités françaises, notamment le ministère de l'Intérieur. Ainsi, David Skuli, chef de la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP), est intervenu en mai 2005 lors d'une conférence organisée par EADS à Pékin, sur la "sécurité territoriale et les mesures de sécurité pendant les Jeux olympiques". Dans le cadre de la préparation du dispositif de sécurité pour les Jeux olympiques 2008, EADS a déjà vendu à la municipalité de Pékin des systèmes de communication TETRA. Plus de trente mille policiers et agents municipaux seront équipés de matériel européen. EADS Secure Networks espère obtenir une large partie du marché des JO, également convoité par des entreprises nord-américaines - notamment le consortium SAIC - australiennes et israéliennes. Depuis deux ans, EADS participe activement au Salon chinois de la police, en proposant une solution globale au problème de la sécurité de Pékin. En 2005, Patrick Jourdan d'EADS Defence and Communications Systems était très clair : "En nous concentrant sur les Jeux olympiques de 2008, EADS n'a pas l'intention d'imposer ses propres idées sur la sécurité aux organisateurs. Ce que notre compagnie souhaite faire, c'est aider les autorités chinoises à définir et mettre en place leur propre système de sécurité." EADS sera également très présent au cours de l'Exposition internationale sur l'équipement policier et la technologie antiterroriste (CIPATE 2007) qui doit se tenir en mai 2007 à Pékin. Selon ses organisateurs, cet événement permettra aux autorités de se décider sur les projets de sécurité pour les JO de 2008. De leur côté, les autorités chinoises ont précisé leurs ambitions pour assurer la sécurité des Jeux olympiques. Zhou Yongkang, ministre de la Sécurité publique, a demandé, le 25 octobre, plus de moyens pour mieux contrôler la société chinoise. Au moins 32 journalistes et 52 cyberdissidents et internautes sont actuellement emprisonnés en Chine populaire. En février 2006, un journaliste a été battu à mort par un policier dans la province du Zhejiang (Est).