Deux blogueurs sont interdits de critiquer un député poursuivi en justice

Le 10 novembre 2009, l’économiste Adriana Vandoni et l’avocat Enock Cavalcanti se sont vus obligés de retirer de leur blogs respectifs (www.prosaepolitica.com.br et paginadoenock.com.br) tout propos jugé “offensant” pour le député José Riva (PP), président de l’Assemblée législative du Mato Grosso (sud-ouest). Le juge Pedro Sakamoto a ajouté que toute nouvelle publication critique à l’encontre du député serait passible d’une amende pouvant s’élever jusqu’à 1000 reais (390 euros). Pourtant le cas José Riva se prête aux commentaires. Près de cent actions civiles pour des affaires de détournement de fonds, plus dix-sept autres pour association de malfaiteurs, sont en cours contre le député, à la tête d’un vaste empire financier et considéré comme l’une des personnes les plus puissantes de l’Etat. “Il s’agit d’une atteinte grave à la liberté d’expression puisque les deux blogueurs ne font qu’émettre une opinion, ce qui n’est pas un délit. La censure préventive est par ailleurs contraire aux principes de la Constitution démocratique de 1988. Nous demandons aux autorités fédérales de se prononcer sur cette affaire et de mettre un terme à ces pratiques de pression inacceptables de la part de leaders politiques, même s’il s’agit de partisans du gouvernement”, a déclaré Reporters sans frontières. Les villes de l’intérieur du pays sont particulièrement touchées par les cas de censure de ce type. Les journaux sont moins nombreux et moins puissants, Internet est l’un des derniers espaces publics où l’on peut exprimer son opinion librement, ou presque. La censure judiciaire est un moyen efficace de pression économique, car les recours pour les accusés (faire appel, avoir un avocat) sont coûteux. Le temps passe, la censure reste. Cette affaire n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’histoire récente du quotidien O Estado de São Paulo, frappé de la mesure de censure préventive depuis le 31 juillet 2009. Le journal s’est vu interdire de publier toute information relative aux affaires de corruption mettant en cause l’entrepreneur Fernando Sarney, fils de José Sarney, ancien président de la République et actuel président du Sénat. Reporters sans frontières avait dénoncé dans un communiqué du 5 octobre le transfert de l’affaire vers une juridiction de l’Etat de Maranhão dont le gouverneur n’est autre que la sœur de Fernando Sarney.. Mais 118 jours après la mesure de censure préventive, les autorités politiques ne se sont toujours pas prononcées sur l’affaire. (Photo: www.prosaepolitica.com.br)
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Updated on 20.01.2016