Des policiers bastonnent, censurent et intimident des journalistes

Reporters sans frontières est indignée par l'agression, dans la soirée du 16 septembre, de trois journalistes de télévision, Wadood Mushtaq, Zahid Malik et Nazir Awan. Après que cette agression a été dénoncée à l'antenne, la police a censuré la chaîne ARYONE World (ARY TV). Par ailleurs, un officier de police a accusé de meurtre un journaliste de The News pour se venger d'un article sur des exécutions extrajudiciaires. “C'est avec consternation que nous avons appris l'existence de ces violations de la liberté de la presse commises par des policiers pakistanais. Que des journalistes soient agressés par des policiers, c'est malheureusement monnaie courante au Pakistan, mais qu'ensuite ces même policiers censurent leur média, c'est tout simplement inacceptable. La suspension par le gouvernement de deux officiers de police impliqués dans cette affaire est un geste encourageant qui dissimule mal l'absence de peines plus conséquentes dans des affaires précédentes. Ces deux affaires révèlent le climat difficile dans lequel travaillent les journalistes du pays, “ a déclaré l'organisation. Lors d'une réunion d'un parti religieux à Lahore, capitale de la province du Pendjab, Wadood Mushtaq de ARY TV a été témoin de l'agression de Nazir Awan d'ATV par des policiers. Wadood Mushtaq a demandé à son cameraman, Zahid Malik, de filmer la scène tout en cherchant à s'interposer. La police s'en est finalement prise aux deux reporters de la chaîne ARY TV. Des policiers les ont roués de coups et les ont emmenés au poste de police. Suite à l'intervention des autorités locales, ils ont été transférés à l'hôpital. Wadood Mushtaq a été sérieusement blessé au visage et à la mâchoire. Le corps de Nazir Awan est entièrement tuméfié et l'un de ses bras fracturé. Quant au cameraman, il souffre d'une lésion à la colonne vertébrale. Plus tard dans la nuit, des officiers de police de chaque district du Pendjab ont ordonné aux techniciens de tous les opérateurs de câble de couper la retransmission d'ARY TV qui passait en boucle les images de l'agression en la qualifiant de « tortures ». Quelques heures plus tard, le chef du gouvernement du Pendjab, Pervaiz Elahi, a suspendu de leurs fonctions les officiers de police Mukhtar et Younas Shah, impliqués dans ces incidents. L'organe de régulation des médias électroniques PEMRA a qualifié l'ordre émis par la police d'illégal et anticonstitutionnel. Par ailleurs, Shakeel Anjum, journaliste spécialisé dans les affaires criminelles pour le quotidien The News - dont le domicile a récemment été attaqué - vient d'être accusé par la police d'être impliqué dans un triple meurtre. « C'est la continuation d'une veille histoire », a dénoncé le journaliste auprès de Reporters sans frontières. En effet, l'officier de police Idrees Rathore, dont les méfaits ont été exposés par Shakeel Anjum dans ses articles, a inclus le nom du journaliste dans un procès-verbal dressé pour meurtre. L'officier de police tente de se venger d'un article de mai 2005 sur son implication dans l'exécution extrajudiciaire de deux jeunes hommes. Malgré les preuves apportées par l'article de Shakeel Anjum, l'officier n'a jamais été inquiété. Reporters sans frontières demande au gouvernement de prendre des mesures pour que le nom du journaliste de The News soit retiré de la plainte, et que l'officier Idrees Rathore soit sanctionné pour cet abus d'autorité. La PFUJ (Pakistan Federal Union of Journalists) a appelé le gouvernement pakistanais à ne pas laisser dériver le pays vers un Etat policier.
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Updated on 20.01.2016