Depuis 10 ans, 19 journalistes victimes de disparition forcée dans le monde

À l’occasion de la journée internationale des victimes de disparition forcée, Reporters sans frontières (RSF) dénonce le rôle actif joué par les gouvernements pour passer sous silence le sort et la situation de 19 professionnels des médias actuellement victimes de disparitions forcées, dont le monde reste sans nouvelle depuis près de dix ans et appelle les autorités à tout mettre en œuvre pour que ces journalistes recouvrent la liberté.

À ce jour, plus de la moitié des journalistes disparus dans le monde au cours des dix dernières années sont victimes de disparitions forcées. Sur les 32 journalistes disparus dans le monde au cours de la dernière décennie, 19 sont victimes de disparition forcée. Et les gouvernements sont responsables puisque par définition, cette pratique de privation de liberté implique des agents de l'État qui nient cette détention ou dissimulent le sort de la personne et son lieu de détention. 

“Alors que le nombre de disparitions forcées ne cesse de croître, RSF s’inquiète du rôle actif de certaines autorités pour réduire au silence les voix des journalistes, au péril de leurs libertés. RSF demande la ratification universelle de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, qui a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 2006, mais ne compte à ce jour que 75 ratifications.

Antoine Bernard
Directeur du plaidoyer et de l'assistance de Reporters sans frontières (RSF)

Plus d’une dizaine de gouvernements sont à l’origine de ces disparitions. Sur les 19 journalistes ainsi disparus depuis 2015, le Burkina Faso enregistre 4 disparitions forcées, le Mali 3, la République démocratique du Congo 2 et la Palestine 2 (les journalistes Haytham Abdel Wahed de Ain Media et Nidal al-Wahidi du site d’information News Press ayant été enlevés par l’armée israélienne le 7 octobre 2023). 

Six nouvelles disparitions forcées en 2024

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professionnels de l'information ont disparu depuis le début de l’année 2024, un chiffre en hausse depuis 2023 (5 journalistes en 2023).
  • Burkina Faso : un pic de disparitions forcées a ébranlé le pays en juin dernier. Quatre journalistes ont disparu en une dizaine de jours, ce qui fait du Burkina Faso le pays avec le plus grand nombre de cas en 2024. Le rédacteur en chef du groupe Omega Médias, Alain Traoré, journaliste satirique dont la chronique “Le Défouloir” critique la société et le pouvoir, a été enlevé à son domicile le 13 juin. Le chroniqueur de la chaîne BF1 Kalifara Séré, connu lui aussi pour ses critiques incisives contre la junte militaire, a disparu mystérieusement après une audition par le Conseil supérieur de la communication, le 19 juin dernier. Neuf jours plus tard, le 28 juin, son confrère Adama Bayala, également chroniqueur sur BF1, a été enlevé en plein jour après avoir reçu des menaces. Le directeur de publication du journal l’ÉvénementSerge Atiana Oulon, a quant à lui été enlevé dans la matinée du 24 juin 2024. 
     
  • Ukraine : la journaliste Zhanna Kyseliova a été enlevée le 27 juin par les forces d’occupation russes à son domicile à Kakhovka, ville de la région de Kherson occupée par la Russie. Ancienne rédactrice en chef du journal local Kakhovska Zorya – avant sa liquidation consécutive à l’invasion du 24 février 2022 –, elle est l’une des trois femmes journalistes victime de disparition forcée, disparue après 2015 . Ce n’est pas la première fois que les autorités russes enlèvent des journalistes sans le revendiquer. Les enquêtes de RSF ont permis de faire la lumière sur la disparition forcée du correspondant de l’agence de presse ukrainienne UNIANDmytro Khyliuk, enlevé le 3 mars 2022 dans un village au nord de Kyiv. 
     
  • Au Nicaragua, le 12 juillet, sept policiers ont fait irruption au domicile de la journaliste et militante nicaraguayenne Fabiola Tercero Castro, dans la capitale, Managua, alors que cette dernière était assignée à résidence et avait  l'obligation de se présenter quotidiennement à un poste de police. La journaliste, qui a travaillé pendant de nombreuses années pour divers médias, comme le magazine en ligne Galeria News, pourrait être dans une prison d'État, bien qu'il n'y ait pas d'information officielle confirmant cette théorie. Le régime du président Daniel Ortega a intensifié sa répression contre les quelques journalistes indépendants qui restent dans le pays.
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journalistes victimes de disparition forcée dans le monde après 2015, encore introuvables à ce jour.
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