Dégradation de la sécurité des journalistes dans le Sud

Les journalistes des districts de Barisal et de Jhalakati (sud du pays) sont victimes d'une campagne de violence et d'intimidation de la part de certains membres du BNP (parti au pouvoir). Reporters sans frontières a recensé dix agressions de journalistes, deux attaques de médias, dix plaintes abusives contre des reporters et quatre familles de journalistes menacées, entre le 6 et le 11 décembre. Les quotidiens Janakantha et Dakhinanchal sont toujours interdits de fait dans la région. Reporters sans frontières est extrêmement choquée de voir les militants du parti au pouvoir s'en prendre avec autant de violence à la presse." A travers les agissements du BNP contre les journalistes de Jhalakati et de Barisal, c'est la possibilité pour les journalistes de couvrir librement de sujets cruciaux, notamment la collusion entre les politiques et le crime organisé, qui est menacée", a écrit l'organisation dans une lettre adressée au Premier ministre Khaleda Zia. L'organisation demande l'arrestation immédiate de Mir Ziauddin Mizan qui serait le meneur de ces violences. Reporters sans frontières tient également à la disposition des autorités les noms d'une vingtaine de militants impliqués. L'organisation rappelle que le ministre de la Justice et celui de l'Intérieur ont été élus au Parlement dans ces deux districts. Les militants politiques à l'origine des troubles se réclament d'eux et invoquent leur protection. Selon les premières estimations de Reporters sans frontières pour l'année 2003, le Bangladesh est, une fois encore, le pays du monde le plus violent envers les journalistes. Le 8 décembre, des dizaines de membres du BNP et de son organisation de jeunesse, Jatiyatabadi Jubo Dal, ont empêché la tenue d'un meeting au Club de la presse de Jhalakati (sud) et ont agressé au moins sept journalistes. Des reporters s'étaient rassemblés pour protester contre l'agression, le 6 décembre, de Humayun Kabir, du quotidien régional Dakhinanchal à Jhalakati. Des membres du BNP lui avaient assené des coups de couteau et de bâton pour le "punir" d'un article sur Mir Ziauddin Mizan, responsable local du BNP et du Jatiyatabadi Jubo Dal. Le journaliste a passé plusieurs jours à l'hôpital. Lors de l'attaque du Club de la presse, les assaillants ont blessé cinq correspondants de quotidiens locaux Manabendra Batobayal du Dainik Sangbad, Azad Alauddin du Daikinanchanl, Shamim Ahmed et Shamim Azad du Bhorer Kagoj, Akkas Sikder du Dainik Arthaniti, Mominul Islam Mehdi, président de l'Association des avocats de Barisal, et le chauffeur de journalistes de Barisal. Une dizaine de journalistes ont été retenus en otages pendant plusieurs heures dans les locaux du Club de la presse. Les militants du BNP en avaient condamné les issues. Les véhicules utilisés par les journalistes de Barisal pour se joindre à leurs confrères de Jhalakati ont été endommagés par les militants. La police, qui avait demandé aux journalistes d'annuler leur manifestation, est restée passive pendant les incidents. Le même jour, les bureaux du quotidien local Shatakantha ont été vandalisés. Des membres du BNP ont également lancé des pierres contre le domicile du directeur du journal, Zahangir Hossain Monju, et coupé ses lignes téléphoniques. Ce dernier avait participé à l'organisation des manifestations de soutien aux journalistes agressés. Le 9 décembre, des responsables de l'organisation de jeunesse du BNP ont porté plainte pour "extorsion", sur la base de faux témoignages, contre dix journalistes de Jhalakati. Selon Anisur Rahman Swapan, président de l'Union des journalistes de Barisal (BRU), la police se fait complice des violences en acceptant d'enregistrer ces fausses plaintes. De leurs côtés, des responsables du Club de la presse de Jhalakati ont déposé une plainte contre leurs agresseurs, mais la police n'a pour l'instant procédé à aucune arrestation. Le même jour, des militants du BNP ont vandalisé un magasin appartenant à la famille du journaliste Akkas Sikder du Dainik Arthaniti. Les 10 et le 11 décembre, des militants et des policiers ont fouillé des dizaines de maisons pour tenter d'arrêter une dizaine de journalistes cités dans le faux cas d'extorsion. Certains domiciles ont été vandalisés. Les journalistes recherchés, qui avaient reçu des menaces de mort par téléphone, ont décidé de se cacher. Les militants du BNP ont par ailleurs interdit la diffusion dans le district des quotidiens Janakantha et Dakhinanchal. Leurs reporters respectifs, notamment Shawkat Milton, ont été déclarés "interdits de séjour". Suite à ces violences, la mobilisation des journalistes s'intensifie dans la région. Des drapeaux noirs ont été accrochés, en signe de protestation, sur les locaux des médias.
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Updated on 20.01.2016