Christophe Grébert condamné pour “diffamation”, le rachat massif d’exemplaires du Canard enchaîné reste impuni
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Reporters sans frontières regrette la condamnation, le 4 septembre 2012, du blogueur et conseiller municipal d’opposition Christophe Grébert à 1 500€ d’amende avec sursis et 500€ de dommages et intérêts par le tribunal correctionnel de Nanterre. Ce dernier l’a reconnu coupable de “diffamation” à l’encontre de la maire de Puteaux, Joëlle Ceccaldi-Raynaud, dans le cadre de propos rapportés par le journaliste Jim Jarrassé dans un article publié le 20 octobre 2011 par Le Figaro. Le journaliste, également poursuivi, a été relaxé par le tribunal qui lui a reconnu le bénéfice de la bonne foi.
L’organisation craint que cette condamnation ne consacre la stratégie de harcèlement judiciaire employée par la maire de Puteaux pour faire taire les voix critiques, et dont M. Grébert est l’une des principales victimes. Ce dénouement ne doit pas éluder la gravité des faits dénoncés par le blogueur, à savoir le rachat de l’ensemble des exemplaires mis en vente à Puteaux du numéro 4747 du Canard enchaîné, qui comportait un article gênant pour Joëlle Ceccaldi-Raynaud.
“Dans une affaire concernant des agissements d’une extrême gravité à l’encontre de la liberté de l’information, la bonne foi aurait également dû être reconnue à Christophe Grébert, qui ne faisait que s’interroger sur les moyens utilisés par le maire pour appliquer cette censure d’un autre âge, a ajouté Reporters sans frontières. Les garanties de la liberté d’expression auraient d’autant plus pu s’appliquer qu’il s’exprimait à l’oral, en tant qu’élu de l’opposition”.
L’article de Jim Jarrassé, intitulé “le maire de Puteaux prive ses habitants du Canard”, indiquait: “L'élu du MoDem (Christophe Grébert) craint que cet argent ait été puisé dans le budget de la Ville consacré à l'aide sociale : selon lui, Joëlle Ceccaldi-Raynaud dispose chaque mois d'une caisse de 20.000 euros en liquide, qu'elle peut ‘utiliser à sa guise’.”
Sur le fond, le jugement ne remet pas en cause les révélations du Canard Enchaîné, “qu’il s’agisse de celles relatives à l’existence de comptes au Luxembourg, ou, surtout, de celles afférentes à la rafle préalable de tous les exemplaires diffusés à Puteaux par un motard, employé municipal, ayant payé en liquide”. Le tribunal souligne qu’il est “légitime” qu’un conseiller municipal d’opposition réagisse sur ce sujet, “manifestement d’intérêt local”, rejetant la qualification d’“obsession quasi-pathologique” émise par Mme Ceccaldi-Raynaud.
Contacté par Reporters sans frontières, Christophe Grébert a accusé la victoire du maire : “après six ans d’acharnement, elle finit par gagner”. “Il y a un déséquilibre de moyens évidents, j’espérais que la justice en prendrait compte”, a-t-il ajouté avant d’affirmer : “l’objectif est politique, (il) est clairement de me faire taire”.
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26.03.2012 - Après dix ans d’activité, le blog monputeaux.com succombera-t-il à l’acharnement judiciaire ?
Reporters sans frontières apporte son soutien au blogueur Christophe Grébert, victime d’un véritable harcèlement judiciaire. L’auteur du blog monputeaux.com, également conseiller municipal d’opposition de la ville de Puteaux (Hauts-de-Seine), a reçu, le 16 mars 2012, une assignation en justice, qui s’ajoute aux quatre procès en cours et aux deux plaintes déjà déposées contre lui. Cette énième procédure judiciaire pourrait, selon Christophe Grébert, sonner le glas du blog monputeaux.com pour cause d’asphyxie financière.
“L’acharnement judiciaire dont Christophe Grébert fait l’objet est très inquiétant, et symptomatique d’une forme de censure pernicieuse. Il est facile de faire taire un blogueur citoyen à coups d’intimidations, de pressions et de procès. Face à des adversaires plus puissants et mieux armés, les blogueurs n’ont plus d’autre choix que l’autocensure”, s’est inquiétée l’organisation.
Cette dernière assignation fait suite à la plainte de dix-neuf élus UMP, qui réclament au blogueur un total de 76 000 euros de dommages et intérêts. Ils invoquent l’article 9 du code civil, arguant que le blogueur a violé leur vie privée en révélant qu’ils profitaient ou avaient profité de logements sociaux dans un article publié le 10 novembre 2011. L’assignation en justice réclame également le retrait de l’article en question, intitulé “48,6% des élus UMP de Puteaux habitent des logements sociaux : la liste, résidence par résidence”.
Blogueur citoyen de la première heure (il a créé monputeaux.com en 2002), Christophe Grébert fait l’objet de poursuites judiciaires récurrentes depuis des années. S’il a été relaxé par le passé, reste que l’accumulation des frais de justice le conduit aujourd’hui à ce qu’il désigne comme une “autocensure imposée”, et à envisager de fermer son blog.
Contacté par Reporters sans frontières, Christophe Grébert a fait part de son découragement face à ce harcèlement judiciaire et aux charges financières qui lui sont imposées. “Je n’ai plus les moyens de m’exprimer librement. Je dois actuellement 20 000 euros de frais d’avocats et de dommages et intérêts”, a-t-il témoigné.
En plus des frais de justice, le montant des dommages et intérêts réclamés par les plaignants est extrêmement élevé pour un particulier. Les blogs étant soumis à la loi sur la presse, ils tombent sous les mêmes sanctions que les grands groupes de médias. Or, ces derniers peuvent assumer des dommages et intérêts qui conduiraient en revanche un blogueur à la ruine. “La loi sur la presse n’est plus adaptée à la réalité numérique. Il faut la réformer pour respecter la liberté d’expression du citoyen”, a déclaré Christophe Grébert.
Avec d’autres blogueurs français, il a créé le collectif Web Citoyen, plateforme d’échange et de réflexion sur la liberté d’expression en ligne.
Lire le témoignage apporté par Christophe Grébert en 2008 lors du Forum Légipresse, organisé par la revue mensuelle de droit des médias Légipresse.
Rejoindre le comité de soutien à Christophe Grébert sur Facebook.
Signer le pacte de Reporters sans frontières pour que la défense la liberté de la presse en France soit au coeur des élections présidentielles 2012.
Publié le
Updated on
20.01.2016