Censures et bavures à la veille du 1er Octobre

"La paranoïa sécuritaire des autorités à la veille des célébrations du 60e anniversaire de la proclamation de la République populaire de Chine, a conduit à un renforcement de la censure sur Internet et à plusieurs bavures à l'encontre de journalistes étrangers. Le comportement de policiers à l'encontre de trois journalistes japonais est particulièrement inacceptable. Ce que le pouvoir souhaite faire passer pour une fête se transforme en un casse-tête pour les internautes et les reporters", a affirmé Reporters sans frontières. Les administrations en charge du contrôle d'Internet ont redoublé d'efforts pour empêcher les internautes basés en Chine, notamment les expatriés, d'utiliser des softwares de contournement de la censure, comme Freegate, et des logiciels VPN. Selon des experts interrogés par l'organisation, des dizaines de milliers d'adresses IP, soupçonnées par les autorités d'utiliser Freegate, et des réseaux VPN, notamment ceux qui sont gratuits, ont été bloquées au cours des derniers jours. "La Grande muraille électronique n'aura jamais été aussi consolidée qu'avant les célébrations du 1er octobre, preuve en est que le gouvernement chinois n'est pas aussi sûr de son bilan", a estimé Reporters sans frontières. Ces nouvelles restrictions rendent encore plus difficile l'accès des internautes aux réseaux sociaux Facebook et Twitter et aux sites YouTube, bloqués depuis juillet dernier. Alors que les dirigeants chinois font de la lutte contre le séparatisme l'un des mots d'ordre de ce soixantième anniversaire, une nouvelle régulation vient d'être promulguée pour lutter contre le séparatisme en ligne dans la province du Xinjiang. Selon une étude de Reporters sans frontières sur les sites en ouïghour ou basés au Xinjiang, l'étau ne s'est toujours pas desserré depuis les émeutes de début juillet 2009. La plupart des sites existant avant les événements ne sont toujours pas accessibles ou leur contenu n'est plus actualisé. Sur plus de 65 sites consultés pour cette étude, 54 sont toujours bloqués pour les internautes chinois ou depuis l'étranger. Même le site tianshannet.com (basé au Xinjiang), pourtant salué par les autorités comme un exemple de respect des régulations, n'est plus accessible. Depuis pratiquement trois mois, les habitants du Xinjiang sont coupés d'Internet et les Ouïghours sont privés de toute information indépendante des médias officiels. Par ailleurs, trois sites mongols basés en Chine ont été bloqués, à l’approche du 1er octobre. Mongol Ger Association (http://www.mongolger.net/), Mongol People Chat Room (MGLhun, hebergé sur la site http://www.sina.com.cn/) et Mongolian People (http://www.mongolhun.com/) ont été rendus inaccessibles au cours des derniers jours. Le site Mongol Ger Association était devenu très actif dans la promotion de la langue mongole, évoquant des sujets sensibles tels que les détentions arbitraires et le droit d’accéder à la terre pour les Mongols. Le propriétaire du site, Sodmongol, a été détenu par les autorités chinoises le 13 juin 2009. Mongol People Chat Room a été fermé sans avertissement préalable. Il traitait aussi bien de politique, de culture, d’environnement et organisait des événements sur les droits des Mongols en Chine. Enfin, le site Mongolian People offrait des services aux Mongols de Chine, mettant en relation les gens et organisant des actions de charité. Selon les autorités, ces sites conspirent avec des forces étrangères hostiles et séparatistes. Ces même motifs ont été évoqués pour censurer des dizaines de sites et forums tibétains (communiqués). Par ailleurs, des hackers chinois ont posté des messages vulgaires et des slogans xénophobes sur les sites de festivals de films taïwanais et australien pour protester contre la diffusion du documentaire "Les dix conditions de l’amour" sur l'activiste ouïghoure en exil, Rebiya Kadeer, accusée par Pékin d’avoir incité à la violence dans le Xinjiang. Les hackers, qui ne cachent plus leur affiliation au Parti communiste chinois, demandent que les organisateurs s’excusent auprès des Chinois pour avoir inclus ce documentaire dans le programme. Des journalistes étrangers basés en Chine ont également été les cibles d'attaques informatiques. Des messages électroniques contenant des virus ont été adressés à des correspondants français, américains, singapouriens et italiens. Des assistants chinois de reporters étrangers ont également été visés par ces emails piégés qui visent à prendre un contrôle parallèle sur l'ordinateur du destinataire. Au même moment, des sites Internet chinois basés à l'étranger, notamment Boxun, sont victimes d'attaques D-DOS très violentes (attaque durant laquelle le serveur cible est attaqué par plusieurs ordinateurs simultanément). A Pékin, les journalistes étrangers qui ont tenté de couvrir les préparatifs du défilé du 1er octobre ont été violemment pris à partie par des policiers. Ainsi, le 18 septembre, trois journalistes de l'agence de presse japonaise Kyodo ont été agressés dans leur chambre d'hôtel par des hommes en civil après une répétition de la parade officielle. Des reporters ont été frappés à la tête et des ordinateurs ont été détruits. Les autorités ont mis en garde plus d'une quinzaine de médias étrangers de ne pas filmer ou prendre des clichés des préparatifs. Le Foreign Correspondents' Club of China (FCCC) a demandé au ministère des Affaires étrangères de s'expliquer car cette interdiction ne repose sur aucune règle ou loi.
Publié le
Updated on 20.01.2016