Yahyah Jammeh doit mettre fin à 20 années de violations des droits humains impunies

A l’occasion du triste anniversaire des 20 ans au pouvoir du dictateur Yahyah Jahmmeh, Reporters sans frontières s’associe à plusieurs organisations de défense de la liberté d’expression et des droits de l’homme pour demander la fin des 20 années d’impunité pour les violations des droits de l’homme commises en Gambie.
Le président gambien Yahyah Jahmmeh, fait partie des 39 prédateurs de la liberté de la presse.

22 Juillet 1994 - 22 Juillet 2014 : 20 ans d'impunité en Gambie
Déclaration conjointe
Le 22 juillet 1994, un groupe de militaires dirigés par le lieutenant Yahya Jammeh renverse le président Dawda Jawara au pouvoir en Gambie depuis 1970. Aidé par l’armée, Yahya Jammeh, s’autoproclame Président de la République et cumule pendant un temps les fonctions de président de la République, de ministre de la Défense et de l’Intérieur.
Depuis, le gouvernement gambien ne tolère aucune opposition et commet des violations graves des droits humains. Les défenseurs des droits humains, les journalistes, les opposants politiques et d’autres citoyens critiques à l’égard de la politique gouvernementale continuent de subir des manœuvres d'intimidation, des actes de harcèlement, des arrestations arbitraires, des incarcérations, des actes de torture et de mauvais traitement, des menaces de mort et des disparitions forcées.
La sanglante répression de manifestations d’élèves en avril 2000, l'homicide illégal du journaliste Deyda Hydara en 2004, la disparition forcée du journaliste Ebrima Manneh et la torture du journaliste Musa Saidykhan en 2006, les exécutions arbitraires de neuf prisonniers en 2012 et la détention pendant cinq mois au secret du défenseur des droits humains Imam Baba Leigh la même année. Autant de violations des droits humains perpétrées ces 20 dernières années.
Le gouvernement gambien refuse de mettre en œuvre les décisions de la Cour communautaire de justice de la communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), notamment en refusant de verser des dommages et intérêts à Musa Saidykhan et aux familles d’Ebrima Manneh et de Deyda Hydara.
Depuis l’avènement au pouvoir du président Yahya Jammeh, le système judicaire gambien s’est considérablement affaibli du fait de l’ingérence récurrente de l’exécutif et de l’adoption de lois toujours plus répressives visant à réduire au silence les voix dissidentes.
Par exemple, les modifications du Code pénal adoptées par l'Assemblée nationale en mai 2013 ont alourdi les sanctions pour toute personne qui "donne de fausses informations aux fonctionnaires". L’article 114 modifié fait passer l’amende de 500 dalasi (environ 13 dollars US) et d’une peine de prison de six mois à une amende de 50.000 dalasi (1.293 dollars US), et plus de cinq ans de prison.
Un amendement au Code de la communication adopté en juillet 2013 précise qu’aussi bien les utilisateurs d'Internet que les journalistes et les blogueurs, coupables de diffusion de "fausses nouvelles" sont passibles de 15 ans de prison et d’une amende pouvant atteindre 3 millions de dalasi (74.690 dollars US).
Ce climat de peur incite la plupart des journalistes, des défenseurs des droits humains et des citoyens à se murer dans le silence ou à fuir le pays.
Devant ces violations flagrantes et continues des droits humains dans ce pays qui abrite pourtant le siège de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), principal mécanisme africain de protection et de promotion des droits humains, nos organisations continuent de se mobiliser pour que cessent la répression et l’impunité en Gambie.
Nous alertons la Communauté internationale, en particulier la Commission Africaine, la Cedeao et les gouvernements africains, sur la détérioration de la situation des droits humains en Gambie ces 20 dernières années et sur l’absence de voie de recours effectives pour les victimes.
Nous exhortons le président Yahya Jammeh à s’assurer que les autorités gambiennes :
- enquêtent sur les violations des droits humains qui leur sont signalées, et traduisent les auteurs en justice ;
- abrogent les dispositions législatives utilisées pour restreindre la liberté d'expression, notamment la loi relative à l'information et à la communication, la loi relative à l'amnistie et la loi portant modification du Code pénal ;
- promeuvent le respect des droits universels à la liberté d’expression, de réunion et d’association et permettent aux journalistes, aux défenseurs des droits humains et aux militants politiques d’exercer leurs activités sans crainte d’être attaqués, arbitrairement arrêtés, torturés et soumis à des disparitions forcées;
- libèrent immédiatement et sans condition tous les prisonniers de conscience, y compris le journaliste Ebrima Manneh et les membres du parti de l’opposition United Democratic Party (UDP) Amadou Sanneh, Alhagie Sambou Fatty et Malang Fatty ;
- relâchent toutes les personnes actuellement détenues illégalement ou les inculpent pour des infractions prévues par la loi dans le cadre d'un procès équitable ;
- mettent en œuvre et fassent appliquer sans délais les décisions de la Cour communautaire de justice de la Cedeao sur les cas des journalistes Ebrima Manneh(juin 2008), de Musa Saidykhan (décembre 2010) et de Deyda Hydara (juin 2014).
Ont signé :
1. Centre for Human Rights, University of Pretoria 2. South African National Editors Forum (SANEF) (Burkina Faso) 3. Centre de Presse Norbert Zongo (Côte d’Ivoire) 4. Coalition de Société Civile pour la paix et le Développement Démocratique en Côte d’Ivoire (COSOPCI) 5. Club Union Africaine CI Cote d’Ivoire 6. Ligue Ivoirienne des Droits de l’Homme (LIDHO) (Gambie) 7. Democratic Union of Gambian Activists (DUGA) 8. Coalition for Change Gambia (CCG) (Ghana) 9. Akoto Ampaw, Lawyer Kenya 10. Wilson Kipkazi (Liberia) 11. Center for Media Studies and Peace Building (CEMESP) 12. Union des journalists Liberians (Mali) 13. Institut pour la Démocratie et l’Education au Mali (IDEM) 14. Maison de la Presse (Nigeria) 15. Institute for Media and Society 16. International Press Centre (IPC) 17. Media Rights Agenda (MRA) (Sénégal) 18. Cicodev Afrique 19. Conseil des Organisations non Gouvernementales (CONGAD) 20. Ligue Sénégalaise des Droits de l'Homme(LSDH) 21. Rencontre Africaine pour les droits de l’homme (RADDHO) 22. Y’en à Marre 23. Africa Freedom of Information Centre 24. Amnesty International 25. ARTICLE 19 26. Association Des Barreaux Africains (ABA) 27. Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) 28. Fédération des Journalistes Africains (FAJ) 29. Fédération Internationale des Journalistes (IFJ) 30. Forum des Editeurs Africains 31. International Press Institute (IPI) 32. Media Foundation for West Africa 33. Media Institute of Southern Africa (MISA) 34. Panos Institute for West Africa (IPAO) 35. Reporters Sans Frontières (RSF) 36. Union des Journalistes de l’Afrique de l’Ouest (WAJA) (photo slideshow : le président Yahya Jammeh, AFP)
(photo logo : de gauche à droite, les journalistes Deyda Hydara, Ebrima Manneh et Musa Saidykhan)
Publié le
Updated on 20.01.2016