Violences et invitations à boire le thé… au jasmin

Des centaines de policiers en uniforme et en civil, accompagnés de chiens policiers, ont procédé à une véritable démonstration de force, dimanche 27 février 2011, rue Wangfujing, à Pékin, pour empêcher la tenue d’une manifestation dont l’appel avait été relayé les jours précédents sur Internet, inspiré par la révolution du jasmin. Plusieurs journalistes étrangers venus couvrir l’événement ont été bousculés et brutalisés par les forces de l’ordre. Un reporter de Bloomberg News a été roué de coups par des hommes de la sécurité en civil. Blessé à la tête, il a été conduit à l'hôpital. D'autres ont vu leur matériel confisqué par les autorités et leurs images détruites. Une douzaine d'entre eux ont passé plusieurs heures au poste de police. Des médias et des sites Internet (TV5, CNN et le site Linkedin) ont été censurés. Reporters sans frontières dénonce une attitude de voyous inacceptable chez les policiers qui ont utilisé la force et la violence contre les journalistes. Ces incidents traduisent la très grande nervosité du gouvernement de Pékin qui interdit toute image de rassemblements par peur d'un effet de contagion. A quelques jours de la tenue de l’Assemblée populaire nationale, le Parti communiste chinois doit comprendre que l'exercice de la libre expression n'est pas un crime ; il doit comprendre que critiques et débats contradictoires ne sont pas synonymes de chaos et d'instabilité politique. Il doit également respecter le droit à l'information de chaque citoyen. La censure, souvent justifiée pour maintenir la stabilité politique, sert en réalité trop souvent de prétexte pour protéger des intérêts privés, pour fermer les yeux sur la corruption et le népotisme, et pour maintenir l’immobilisme politique. Les journalistes sur les lieux où devait se tenir le rassemblement ont été contrôlés, interdits de filmer et de mener des entretiens, la police invoquant une ancienne réglementation qui impose d’obtenir l'accord écrit d’une personne avant de l’interviewer. Quelques jours auparavant, les autorités leur avaient signifié qu’ils devaient avoir une autorisation pour couvrir cette manifestation, façon déguisée de censurer la presse. Quand les invitations à boire le thé se transforment en détentions De plus, les autorités ont pris des mesures sévères contre les défenseurs des droits de l’homme ou simples internautes qui relaient les appels à manifester tous les dimanches dans treize villes chinoises. Ils sont accusés de « mettre en danger de la sécurité de l’état », et de « subversion au pouvoir de l’état ». Yuan Feng, un jeune travailleur migrant de la province du Henan, vivant dans celle du Guangzhou, a écopé d’une peine de dix jours de détention administrative au centre de détention de la ville de Shantou, le 22 février, pour avoir « utilisé une fausse identité et surfé sur le net », et avoir « posté des informations concernant la révolution du jasmin », sur le réseau social chinois QQ. Ran Yunfei (冉云飞), blogueur de 46 ans et écrivain pour le magazine Sichuan Littérature, est détenu par la police de Chengdu depuis le 20 février, après avoir été invité à boire le thé. La police a également fouillé son domicile et confisqué son ordinateur. Hua Chunhui (华春晖), net-citoyen de 47 ans, de la province du Jiangsu a été arrêté le 21 février dans la ville de Wuxi. Sa fiancée, Wang Yi, est toujours détenue en camp de rééducation depuis novembre 2010 pour un tweet ironique qu’elle avait posté à propos des violentes manifestations anti-japonaises en octobre 2010. Liang Haiyi (梁海怡) : nom de plume, Miaoxiao (渺小), a été également invitée à boire le thé par la police de Harbin, dans la province du Heilongjiang, pour avoir posté des informations sur des sites étrangers à propos de la révolution du jasmin. Elle est actuellement enfermée dans le second centre de détention de Harbin. Chen Wei (陈卫), 42 ans, originaire de la ville de Suining, dans le Sichuan, a été arrêté le 21 février et placé en centre de détention. Il avait disparu depuis que la police l’avait invité à boire le thé, le 20 février au matin. Son domicile a été perquisitionné et son ordinateur, disques durs et clés USB confisqués.
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Updated on 20.01.2016