Une journaliste condamnée à trois mois de prison et un an d’interdiction d’exercer sa profession

Le tribunal de Sanaa en charge de juger des affaires de presse et de publications a condamné, le 16 janvier 2010, la journaliste Anissah Mohammed Ali Othman à trois mois de prison ferme et à un an d’interdiction d’exercer sa profession de journaliste, pour “insulte au président de la République” suite à la publication, en juillet 2007, de deux articles dans l’hebdomadaire Al-Wassat (numéros 155 et 156). Le rédacteur en chef du journal, Jamal Amer, s’est vu infliger une amende de 10 000 rials (34 euros). « Cette condamnation archaïque s’inscrit dans la droite ligne des violations de la liberté de la presse commises par les autorités yéménites au cours des neuf derniers mois. La communauté internationale, à l’occasion de la tenue prochaine de la Conférence internationale sur le Yémen à Londres, doit dénoncer ces exactions quotidiennes au nom de la lutte – légitime - contre le terrorisme », a déclaré Reporters sans frontières. Les deux articles incriminés, intitulés “Intimidation des enfants sur ordre du Président” et “Pouvoir : un montre s’en prend aux impuissants, telle une souris aveugle contre ses ennemis”, avaient été écrits en solidarité avec le journaliste yéménite Abdulkarim Al-Khaiwani, alors emprisonné. « Je n’ai pas été prévenue qu’un tel procès se tenait samedi. Ni moi ni mon avocat n’étions présents. Mon avocat avait été désigné par le tribunal lui-même. En plus, je ne peux même pas faire appel du jugement ! Au Yémen, le Président peut faire tout ce qu’il veut, mais ceux qui veulent s’exprimer et dénoncer ce qui se passe ne le peuvent pas. Le soutien que les pays occidentaux apportent au gouvernement actuel est inacceptable », a dénoncé Anissah Othman à Reporters sans frontières. Abdulkarim Al-Khaiwani a, quant à lui, souligné le caractère illégal de ce jugement : « D’après la constitution yéménite, toute personne doit comparaître devant le tribunal du lieu où elle habite. Or, Anissah Othman habite Taez (sud de Sanaa). Elle n’a pas à comparaître devant un tribunal à Sanaa. En outre, il n’y a aucun équilibre entre le chef d’accusation et la peine prononcée. C’est un jugement politique. » Cette condamnation intervient à dix jours de la tenue, à Londres, de la Conférence internationale sur le Yémen le 28 janvier 2010. A cette occasion, Reporters sans frontières a écrit le 12 janvier dernier au Premier ministre britannique, Gordon Brown, pour qu’il veille à ce que les droits de l’homme, notamment la liberté de la presse, soient inscrits à l’ordre du jour. Depuis mai 2009, les autorités yéménites se sont lancées dans une campagne contre les médias indépendants.
Publié le
Updated on 20.01.2016