Une deuxième loi liberticide sur la presse promulguée en catimini

Reporters sans frontières réitère son appel à la communauté internationale à faire pression sur le président Yahya Jammeh pour que cesse la spirale de la répression contre la presse en Gambie, après avoir appris qu'une deuxième loi draconienne avait été promulguée en secret, le 28 décembre 2004.

Reporters sans frontières réitère son appel à la communauté internationale à faire pression sur le président Yahya Jammeh pour que cesse la spirale de la répression contre la presse en Gambie, après avoir appris qu'une deuxième loi draconienne avait été promulguée en secret, le 28 décembre 2004. « Le président gambien a clairement l'intention de contrôler étroitement les journalistes, dans une période de turbulences et à la veille d'une année électorale cruciale, a déclaré l'organisation. Le silence de ses homologues africains et européens lui laisse les mains libres pour faire de la Gambie l'un des pays les plus répressifs pour la presse en Afrique de l'Ouest. Avec le vote de cette nouvelle loi, l'enquête stérile sur l'assassinat de Deyda Hydara et les propos incendiaires tenus régulièrement par le chef de l'Etat contre les journalistes, c'est quasiment chose faite. » Reporters sans frontières a appris que, le 28 décembre 2004, en dépit des appels des organisations internationales et des journalistes africains, Yahya Jammeh a promulgué la loi dite « Newspaper Amendment Act 2004 » en même temps que le « Criminal Code Amendment Bill 2004 », selon le journal officiel gambien daté du 30 décembre. La deuxième loi multiplie par cinq le coût des licences de parution (de 100 000 dalasis à 500 000 dalasis, d'environ 2 600 euros à environ 13 000 euros). Elle annule l'enregistrement de tous les médias du pays et les oblige à se faire réenregistrer. Par ailleurs, elle contraint les « professionnels des médias » à se doter d'un code de conduite strict dans les six mois et à fixer eux-mêmes des sanctions en cas de manquement à ces règles. La promulgation de ces deux lois n'a été rendue publique qu'à la fin du mois de février 2005. La Gambia Press Union (GPU), le syndicat local des journalistes, a l'intention de contester la constitutionnalité de ces lois en justice. Reporters sans frontières soutient cette initiative. -------------------------- 23.02.2005 - Le président Yahya Jammeh promulgue une loi ouvrant les portes des prisons aux journalistes Reporters sans frontières s'est dite « scandalisée » par le sort réservé à la presse en Gambie, le président Yahya Jammeh ayant promulgué au moins une loi sur la presse le 28 décembre 2004 sans que la Gambia Press Union (GPU, syndicat des journalistes) parvienne, à ce jour, à en obtenir une copie. « La Gambie s'enfonce dans l'obscurité et la communauté internationale feint de ne rien voir, a déclaré Reporters sans frontières. Aujourd'hui, les journalistes gambiens apprennent par la presse que, en catimini, en dépit des appels des journalistes africains et d'organisations internationales, le Président a promulgué une loi extrêmement répressive régissant leur métier. Pendant près de deux mois, le gouvernement n'a pas cru bon de les en informer. Nous sommes scandalisés par la méthode employée par le gouvernement gambien, mais aussi par le contenu de cette loi. Il s'agit d'un grave recul de la liberté de la presse en Afrique de l'Ouest et d'une humiliation supplémentaire infligée par le président Yahya Jammeh aux journalistes de son pays, déjà durement frappés par l'assassinat de Deyda Hydara », a ajouté l'organisation. « Il est grand temps que l'Union africaine (UA), la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), le Commonwealth et les Etats démocratiques entretenant de bonnes relations avec la Gambie convainquent le président Jammeh que la spirale de la répression est inquiétante et dangereuse. La communauté internationale doit aider les journalistes gambiens à préserver leur liberté, au lieu de les ignorer », a conclu l'organisation. Selon le numéro 35 daté du 30 décembre de la Gambia Gazette, le journal officiel de Banjul cité par le quotidien Daily Observer du 22 février 2005, la présidence a officiellement promulgué l'amendement au code pénal voté le 14 décembre par l'Assemblée nationale. Cet amendement modifiant le code de la presse stipule que la publication de propos volontairement diffamatoires et la publication de fausses nouvelles, volontaire ou non, sont passibles d'une peine de prison supérieure ou égale à six mois. Les propos séditieux seraient, eux, passibles d'une peine d'emprisonnement de six mois pour la première condamnation et trois ans pour toute récidive. Toujours selon la Gambia Gazette, le président Yahya Jammeh a donné son assentiment à cette loi le 28 décembre 2004. L'autre disposition législative adoptée le 14 décembre par l'Assemblée nationale n'aurait pas été promulguée. Le « Newspaper Amendment Act 2004 », très critiqué par l'opposition lors du débat au Parlement, annulait l'enregistrement de tous les médias du pays. Il était prévu que les propriétaires de journaux devaient payer une licence cinq fois plus élevée, passant de 100 000 dalasis (environ 2 571 euros) à 500 000 dalasis (environ 12 855 euros), mettant en gage leur domicile en cas de non-paiement. Interrogé par Reporters sans frontières, le président de la GPU, Demba Jawo, a expliqué que le gouvernement ne lui avait pas transmis de copie de la nouvelle loi, malgré ses demandes répétées. « Il n'y pas grand monde au gouvernement qui accepte de me transmettre des informations sur le sujet, a-t-il déploré. Et cela depuis le 28 décembre, imaginez un peu ! » Il a ajouté que le syndicat des journalistes entend porter l'affaire en justice, dès qu'il disposera des éléments suffisants lui permettant de contester la constitutionnalité de la loi.
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Updated on 20.01.2016