Un journaliste contraint de témoigner devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie fait appel de la décision des juges

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPI) a décidé, le 7 juin 2002, de contraindre Jonathan Randal, ancien journaliste du Washington Post, à témoigner devant le tribunal au sujet d'une interview qu'il avait réalisée en 1993 avec un ancien dirigeant des Serbes de Bosnie. Cité à comparaître par une chambre du TPI dans le procès des deux dirigeants serbes de Bosnie, Momir Talic et Radoslav Brdjanin, le journaliste avait précédemment refusé d'obtempérer. Le 3 octobre 2002, la Chambre d'appel du TPI examinera le recours en appel de Jonathan Randal. Reporters sans frontières a réalisé, avec 34 médias et organisations de défense de la liberté de la presse, un amici curiae afin de soutenir la requête de Jonathan Randal. Reporters sans frontières a également interpellé Carla Del Ponte, procureur du TPI, dans un courrier envoyé le 12 juin 2002. "Si les journalistes en zone de conflit sont désormais perçus comme des auxiliaires de la justice internationale, le métier de correspondant de guerre, déjà terriblement dangereux, deviendra bientôt impossible", a écrit Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. "Le reporter témoigne, mais en temps réel et pour l'opinion publique internationale", a-t-il ajouté. Dans un courrier daté du 18 juillet 2002, Carla Del Ponte a répondu que le principe de protection des sources, qui justifierait une exemption de témoigner pour les journalistes, ne s'applique pas dans l'affaire Randal. Le procureur précise que Jonathan Randal avait déjà accepté d'être entendu par les enquêteurs et que la citation à comparaître du 29 janvier 2002 ne visait qu'à "confirmer l'authenticité et l'exactitude des propos et commentaires qu'il avait recueillis de la part de l'accusé Brdjanin, dans un article publié à l'époque du conflit en ex-Yougoslavie". D'après Carla Del Ponte, "il ne s'agissait aucunement pour lui, en comparaissant cette fois devant la juridiction de jugement, d'avoir à révéler des informations secrètes ou reçues par lui en confidence et liées à ce même article". Reporters sans frontières ne se satisfait pas de cette réponse. "Nous avons toujours soutenu la création d'une justice internationale, mais même les causes les meilleures ne justifient pas de violer le pincipe fondamental de la protection des sources journalistiques", a déclaré Robert Ménard à la veille de l'appel de Jonathan Randal.
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Updated on 20.01.2016