Un an de la loi sur les médias en Ukraine : des avancées, mais des ajustements nécessaires

La loi sur les médias célèbre son premier anniversaire, 15 jours après le vote de l’ouverture des négociations pour l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne (UE). Reporters sans frontières (RSF) salue les améliorations qu’apporte cette loi mais appelle à des ajustements afin de renforcer la liberté de la presse dans le pays. 

Malgré la guerre, l’Ukraine a progressé dans l’harmonisation de sa législation sur les médias avec la loi européenne. Prérequis pour accéder au statut d’État membre, cette loi signée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky le 29 décembre 2022 est entrée en vigueur en mars 2023. 

Elle introduit une meilleure réglementation avec notamment la mise en place de mécanismes de corégulation entre le régulateur ukrainien et les médias et d’une meilleure transparence sur les propriétaires des médias. Des ajustements restent tout de même nécessaires en matière d’indépendance du régulateur.

“L’Ukraine a entamé un long processus en faveur de la liberté de la presse marqué par l'adoption, au cours des dix dernières années, de dizaines de réformes favorisant un espace médiatique transparent, indépendant et pluriel. La loi sur les médias en est l’exemple le plus récent. À l’heure de l’ouverture des négociations pour l’adhésion à l’UE, RSF salue les progrès de l’Ukraine pour renforcer et harmoniser sa législation des médias avec le cadre européen. Mais cette loi ne va pas encore assez loin et l’un des principaux problèmes reste le manque d’indépendance du régulateur des médias. Celle-ci doit être renforcée dès que possible afin de favoriser la liberté de la presse.”

Jeanne Cavelier

Responsable du bureau Europe de l'Est et Asie centrale de RSF

Si cette loi éclaircit, détaille et élargit les compétences du régulateur des médias, le processus de nomination de ses membres doit être modifié, afin de garantir l’indépendance totale des décisions. Mais cela ne pourrait se faire qu’en modifiant la Constitution ukrainienne, ce qui est impossible lorsque la loi martiale est en vigueur – elle l’est depuis l’invasion russe du 24 février 2022. 

D’autres améliorations nécessaires de ce texte de loi de près de 300 pages sont en revanche réalisables. Afin de s’aligner sur la législation européenne, il faudrait notamment élargir la définition de ce qu’incluent les discours de haine qui, pour l'instant, sont trop restreints et comprennent uniquement les appels à la haine nationale, raciale et religieuse. En outre, l’achèvement par les représentants des médias en ligne et le régulateur national de l’élaboration commune des critères permettant de définir précisément ce que sont les médias en ligne doit être une des priorités de 2024. 

Enfin, un effort reste aussi à faire du côté des médias : le nombre des demandes d’enregistrement des médias en ligne est variable d’une région à l’autre, mais reste faible dans l’ensemble. Si cette démarche se fait pour le moment sur la base du volontariat, ne pas s’enregistrer empêche de participer aux mécanismes de corégulation et augmente le niveau de responsabilité en cas de violation de la loi.

Depuis la révolution de l’Euromaïdan en 2013, l'environnement de travail des journalistes et le paysage médiatique se sont améliorés en Ukraine. Cependant, la presse reste fragilisée, en raison des exactions contre les journalistes menées par la Russie depuis l’invasion du 24 février 2022 et d’une certaine pression exercée par le gouvernement ukrainien sur les médias, en particulier sur leurs sources militaires.

L’Ukraine occupe la 79e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023.

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