Ukraine : trois chaînes bloquées depuis un an

Trois chaînes d’information en continu ukrainiennes, Espreso, Chaîne 5 et Priamyi, sont exclues depuis un an de la TNT. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités à garantir le pluralisme de l'information en régularisant leur situation au plus vite.

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Triste anniversaire pour la liberté d’informer en Ukraine : le 4 avril 2022, trois chaînes d’information en continu, Espreso, Chaîne 5 et Priamyi, ont été mystérieusement déconnectées du réseau TNT (télévision numérique terrestre), peu après l'adoption d'un nouveau décret leur imposant une coopération avec toutes les autres chaînes d’information nationales. Un an après, il est toujours impossible de savoir qui a pris cette décision, pourquoi et comment elle a été mise en œuvre. Le régulateur des médias, le fournisseur de la TNT et la société publique propriétaire des infrastructures se rejettent la responsabilité, alors qu’un flou juridique s’est installé depuis un an.

Lancées en mai 2022, les actions en justice de Chaîne 5 et Priamyi, appartenant au même groupe Vilni Media, n’ont pas encore abouti. Si en avril 2022, le parlement ukrainien a adopté une résolution en faveur de la liberté de la presse, ce n’est que le mois suivant que son comité dédié aux questions relatives à l’information a examiné le problème de ces chaînes, sans apporter de solution.

Cette situation aberrante n'a que trop duré, s’insurge la responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de Reporters sans frontières (RSF), Jeanne Cavelier. Il est inconcevable que 16 millions de téléspectateurs de la TNT soient privés d’accès aux trois chaînes d’opposition depuis un an dans un imbroglio juridique. Nous ne comprenons pas le manque de volonté politique de résoudre ce problème et appelons les autorités ukrainiennes à se saisir de ce dossier et régulariser la situation au plus vite.”

Deux semaines avant la déconnexion de ces trois chaînes d’opposition, le 18 mars 2022, sortait le décret du Conseil national de sécurité d’Ukraine obligeant les chaînes nationales d’information à s’unir pour alimenter le “marathon de l’information national”. Il formalise une initiative prise au lendemain de l’invasion russe par six grandes chaînes, dont deux publiques, qui ont décidé de co-produire un direct commun, composé de leurs contenus respectifs - un créneau étant réservé à chacun. L’objectif : garantir à la population un accès à une information fiable de manière continue, dans un contexte confus où la désinformation est une véritable arme. Suite à la promulgation du décret, Espreso, Chaîne 5 et Priamyi, ont publiquement manifesté leur volonté de contribuer au “marathon national. Mais si les responsables des chaînes concernées ont confirmé à RSF qu’ils avaient entamé les discussions avec les partenaires, celles-ci n’ont pas été concluantes. Le 4 avril suivant, sans décision formelle du régulateur des médias, pourtant compétent à superviser ce processus en absence d’autre base légale, le signal de ces trois chaînes a disparu de la TNT sans aucun préavis.

“La vraie question est pourquoi ces trois chaînes n’ont pas été admises à participer au Marathon malgré le décret ? Le problème c’est que nous n’avons aucune base légale qui régule la coopération entre les chaînes elles-mêmes”, commente Roman Holovenko, le juriste de l’Institute of Mass Information (l’IMI), le partenaire ukrainien de RSF.

Ni associées à la production de cette initiative, ni rétablies sur la TNT, les trois chaînes sont toujours limitées à la télévision satellitaire et aux services de streaming sans qu’aucune solution ne soit en vue. Espreso, Chaîne 5 et Priamyi sont pourtant toujours facturées par l’entreprise fournissant la TNT, Zeonbud.

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