Taïwan : RSF dénonce un acte de censure, rare et inquiétant, de la part du gouvernement
Sous la pression du gouvernement, une chaîne de télévision publique taïwanaise a récemment modifié le contenu d’un reportage relatif à la récente élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Reporters sans frontières (RSF) appelle le gouvernement à s’engager à ne pas réitérer cette interférence dans la ligne éditoriale des médias.
Les ingérences gouvernementales dans les médias sont rares à Taïwan, modèle de liberté de la presse en Asie-Pacifique classé 27e sur 180 pays et territoires évalués dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024. Pourtant, le 9 novembre 2024, le groupe audiovisuel public taïwanais Public Television Service (PTS) a reconnu avoir retiré, puis modifié, un reportage de sa chaîne anglophone TaiwanPlus en invoquant “des préoccupations concernant l’objectivité, l’équité et l’équilibre du reportage” suite à l’intervention du gouvernement.
Dans le reportage en question, la journaliste Louise Watt avait qualifié le président américain nouvellement élu Donald Trump de “criminel condamné [convicted felon]”, un terme factuel se référant à la condamnation pénale prononcée en mai 2024 par un tribunal étatsunien pour des faits de falsification comptable.
"Nous comprenons que le gouvernement taïwanais considère l’élection du président des États-Unis comme un enjeu important, mais il est absolument inacceptable qu’il s'immisce dans la ligne éditoriale d’une chaîne de télévision dans le but vraisemblable de soigner ses relations diplomatiques. Nous appelons le premier ministre Cho Jung-tai à réaffirmer le soutien de son gouvernement envers la liberté d’informer en s'engageant au respect le plus strict de l’indépendance des médias publics.
En octobre 2024, une délégation de RSF, menée par son directeur général Thibaut Bruttin, avait rencontré le président taïwanais Lai Ching-te et salué à cette occasion la liberté des médias dans le pays, tout en soulignant la nécessité de réformes pour renforcer l’indépendance éditoriale des rédactions.
Taïwan, la seule démocratie du monde sinophone, est victime de pressions croissantes de la part de la République populaire de Chine (PRC), qui revendique agressivement sa souveraineté sur l'île. Du fait d’un environnement médiatique très polarisé politiquement et dominé par le sensationnalisme, seuls trois Taïwanais sur dix disent avoir confiance dans les médias, un des pourcentages les plus bas parmi les démocraties.