Syrie : le fondateur américain de la chaîne OGN détenu par des djihadistes
Le fondateur de la chaîne On The Ground News (OGN), Bilal Abdul Kareem, de nationalité américaine, est détenu depuis près d’une semaine dans la région d’Idlib par le groupe djihadiste Hay’at Tahrir Al-Sham (HTS). Reporters sans frontières (RSF) appelle à sa libération.
Le fondateur et animateur américain d’On The Ground News (OGN), Bilal Abdul Kareem, basé à Idlib, dans le nord de la Syrie, est détenu depuis le 13 août par le groupe djihadiste Hay’at Tahrir Al-Sham (HTS), qui contrôle la région. Selon sa chaîne diffusée sur Twitter, Facebook et Telegram, il est accusé d’incitation à la haine contre HTS.
Selon le témoignage de son beau-fils recueilli par OGN, Bilal Abdul Kareem a été enlevé par les djihadistes avec son chauffeur, Mohammad Al-Homsi, à Atmeh, dans le Rif d’Idlib, et conduit dans un endroit indéterminé.
Quelques heures auparavant, Bilal Abdul Kareem avait relayé le cas de Tauqir Tox Sharif, un travailleur humanitaire enlevé par HTS et qui aurait subi des tortures. Dans une vidéo, il évoquait de nombreux témoignages de détenus ou d’anciens détenus ayant subi des mauvais traitements. Il s'était alors interrogé : “Autorisent-ils la torture dans leurs prisons ?”.
Converti à l’islam depuis plusieurs années, Bilal Abdul Kareem est basé en Syrie depuis 2012. Il affirme avoir survécu à plusieurs tentatives d’assassinat par des drones américains et pense être inscrit sur la “liste de mise à mort” des Etats-Unis. Après avoir occasionnellement collaboré avec des médias internationaux comme CNN et la BBC, il a fondé OGN pour, dit-il, “fournir des informations précises en langue anglaise à une audience occidentale sur la crise syrienne”. Il ne cache pas son opposition au pouvoir de Bachar Al-Assad et sa proximité avec les autorités mises en place par HTS. Sa couverture, considérée comme complaisante avec les djihadistes, lui a cependant permis d’avoir accès à des zones difficiles et de devenir une source d’information dans une enclave fermée à la plupart des médias étrangers. En abordant la question de la torture dans les prisons, il a ainsi franchi une ligne rouge et a perdu les faveurs de l’organisation.
“Bilal Abdul Kareem et son chauffeur doivent être immédiatement libérés et sans condition, réagit Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à RSF. Le groupe HTS sera tenu responsable de leur sort. Vouloir traiter en toute transparence du sujet de préoccupation grandissant qu’est la torture pratiquée dans les prisons de HTS ne doit pas conduire qui que ce soit dans ces mêmes geôles. HTS doit accepter que toutes les informations, même les plus compromettantes, puissent être partagées au sein de l’enclave rebelle.”
En décembre 2019, le photojournaliste sudafricain Shiraaz Mohamed, qui avait été enlevé dans le nord de la Syrie, était libéré après quasiment trois ans de captivité. Même si HTS l’a toujours formellement nié, l’ensemble des sources locales leur avaient attribué son enlèvement. En août également, le journaliste du site d’information Step Feed News Fateh Aslan avait été enlevé par HTS avant d’être libéré deux mois plus tard, en échange de la promesse de ne plus travailler pour son média, jugé « contraire à la révolution ».
La Syrie occupe la 174e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.