Sri Lanka : le journaliste tamoul Uthayarasa Shalin harcelé par l’antiterrorisme
Reporters sans frontières (RSF) appellent les autorités du Sri Lanka à mettre un terme à la campagne de harcèlement qui vise actuellement le journaliste tamoul Uthayarasa Shalin, poursuivi par la division anti-terroriste au prétexte d’accusations parfaitement fallacieuses.
Deux mois de harcèlement et d’intimidations… C’est ce que subit le journaliste indépendant Uthayarasa Shalin depuis que la Division des enquêtes terroristes (DET) du Sri Lanka l’a convoqué le 22 août dernier dans son quartier général de Colombo. Basé à Jaffna, dans le nord de l’île, le reporter écrit pour plusieurs publications, dont le site d’information anglophone Tamil Guardian ou le journal en tamoul Valampuri. C’est pour ce quotidien qu’il a couvert, en juin dernier, une célébration annuelle parfaitement anodine dans un temple hindou, où un élément de décoration en arrière-plan évoquait une carte des provinces du nord et de l’est du pays, lieu de peuplement traditionnel des populations tamoules du Sri Lanka.
C’est au prétexte de ce détail insignifiant que la DET exerce depuis de lourdes pressions sur Uthayarasa Shalin - et ce quand bien même il n’a rien à voir avec l’organisation de cet événement. La présence de son avocat lui a été refusée lors du premier interrogatoire, qui a davantage ressemblé à une litanie de menaces : ses interlocuteurs lui ont par exemple fait savoir que “si la même chose s’était passée il y a deux ans, on n’aurait pas pris la peine de t’interroger comme ça ; on t’aurait juste pendu par les pieds et fait disparaître”.
Harcèlement continu
Depuis, le journaliste subit des actes de harcèlement continu de la part des forces de sécurité à Jaffna - interpellations par la police, insultes, etc. Et les actes d’intimidations se sont aggravés en ce mois-ci, puisque cinq de ses proches ont à leur tour été convoqués par l’antiterrorisme, dont son frère Jelsin le 17 octobre.
“Nous appelons les autorités sri-lankaises à mettre immédiatement un terme à cet acharnement contre un reporter unanimement reconnu pour le sérieux de son travail et ses enquêtes sur les violations des droits humains, avertit Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Ces actes d’intimidations, qui visent clairement à faire taire Uthayarasa Shalin, rappellent les pires heures de la répression contre les journalistes tamouls du Sri Lanka. Le gouvernement de Colombo doit faire montre de sa volonté de ne pas renouer avec ce funeste passé.”
Crimes impunis
Selon le baromètres des violations de la liberté de la presse établi par RSF, au moins quinze journalistes ont trouvé la mort au Sri Lanka durant la décennie noire des années 2000, marquée par l’intensification du conflit entre l’armée et la rébellion tamoule, et l’écrasement de celle-ci en 2009. La plupart de ces crimes restent aujourd’hui impunis.
Le Sri Lanka, pays sur lequel RSF publie demain jeudi une étude sur la propriété des médias, figure à la 131e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2018 par RSF.