RSF demande à la Gouverneure Générale de ne pas promulguer la Loi sur les crimes électroniques
Organisation :
Mme Cécile La Grenade
Gouverneure Générale
St George, Grenade Mme la Gouverneure Générale, Reporters sans frontières, organisation internationale de défense de la liberté de l’information, exprime son inquiétude après l’approbation définitive au Parlement de la Loi sur les crimes électroniques, le 9 septembre 2013. Nous ne contestons certes pas la loi dans son principe ni dans certaines de ses dispositions. L’espace Internet ne saurait échapper totalement à l’autorité de la loi et il nous paraît légitime de réprimer des délits ou crimes tels que le vol de document ou de données, l’usurpation d’identité en ligne, ou plus grave, la promotion de contenus à caractère pédophile. Nous estimons en revanche certaines clauses hautement préjudiciables à la libre circulation de l’information et au débat public. Ainsi, la section 6 (1.a) de la Partie II du texte (consacrée à la définition des délits) dispose que :
“Une personne ne doit pas sciemment et sans excuse ou sans justification légale adresser aux moyens d’un système électronique ou d’un appareil électronique une information grossièrement offensante ou ayant un caractère menaçant (…)”
Le contrevenant s’expose en pareil cas à une peine d’un an de prison et/ou à une amende de 100 000 dollars de l’Est Caribéen, soit environ 37 000 dollars US. Sur quel critère une information peut être estimée “offensante”, qu’elle soit vraie ou non sur le fond (ce que l’alinéa se garde de préciser) ? Cette disposition peut très facilement constituer une entrave à la diffusion d’informations d’intérêt général. Elle fournit, par exemple, un argument de poids à toute personnalité publique convaincue de “corruption” pour s’abstenir de rendre des comptes. Une autre inquiétude concerne le champ d’application de la loi. A titre de la section 3 (e) de sa Partie I (préliminaire), elle s’applique dans le cas d’une “offense commise par toute personne, de toute nationalité ou toute citoyenneté, en tout lieu dans ou en dehors du territoire de la Grenade, ayant un effet sur la sécurité de la Grenade ou de ses ressortissants”. Là encore, le manque de précision quant à l’effet sur la sécurité dont il est question peut générer de réelles entraves à la liberté d’informer. Le risque posé par ces dispositions légales nous semble d’autant plus élevé que la Loi donne un pouvoir très large à la police et à la justice pour accéder, en cas d’enquête, aux données personnelles d’un utilisateur. Toutes ces raisons nous amènent à vous demander de ne pas promulguer en l’état la Loi sur les crimes électroniques et de solliciter que le Parlement en reformule les clauses les plus sensibles. En vous remerciant de l’attention que vous porterez à cette lettre, je vous prie d’agréer, Madame la Gouverneure Générale, l’expression de ma très haute considération. Christophe Deloire
Secrétaire général de Reporters sans frontières
Gouverneure Générale
St George, Grenade Mme la Gouverneure Générale, Reporters sans frontières, organisation internationale de défense de la liberté de l’information, exprime son inquiétude après l’approbation définitive au Parlement de la Loi sur les crimes électroniques, le 9 septembre 2013. Nous ne contestons certes pas la loi dans son principe ni dans certaines de ses dispositions. L’espace Internet ne saurait échapper totalement à l’autorité de la loi et il nous paraît légitime de réprimer des délits ou crimes tels que le vol de document ou de données, l’usurpation d’identité en ligne, ou plus grave, la promotion de contenus à caractère pédophile. Nous estimons en revanche certaines clauses hautement préjudiciables à la libre circulation de l’information et au débat public. Ainsi, la section 6 (1.a) de la Partie II du texte (consacrée à la définition des délits) dispose que :
“Une personne ne doit pas sciemment et sans excuse ou sans justification légale adresser aux moyens d’un système électronique ou d’un appareil électronique une information grossièrement offensante ou ayant un caractère menaçant (…)”
Le contrevenant s’expose en pareil cas à une peine d’un an de prison et/ou à une amende de 100 000 dollars de l’Est Caribéen, soit environ 37 000 dollars US. Sur quel critère une information peut être estimée “offensante”, qu’elle soit vraie ou non sur le fond (ce que l’alinéa se garde de préciser) ? Cette disposition peut très facilement constituer une entrave à la diffusion d’informations d’intérêt général. Elle fournit, par exemple, un argument de poids à toute personnalité publique convaincue de “corruption” pour s’abstenir de rendre des comptes. Une autre inquiétude concerne le champ d’application de la loi. A titre de la section 3 (e) de sa Partie I (préliminaire), elle s’applique dans le cas d’une “offense commise par toute personne, de toute nationalité ou toute citoyenneté, en tout lieu dans ou en dehors du territoire de la Grenade, ayant un effet sur la sécurité de la Grenade ou de ses ressortissants”. Là encore, le manque de précision quant à l’effet sur la sécurité dont il est question peut générer de réelles entraves à la liberté d’informer. Le risque posé par ces dispositions légales nous semble d’autant plus élevé que la Loi donne un pouvoir très large à la police et à la justice pour accéder, en cas d’enquête, aux données personnelles d’un utilisateur. Toutes ces raisons nous amènent à vous demander de ne pas promulguer en l’état la Loi sur les crimes électroniques et de solliciter que le Parlement en reformule les clauses les plus sensibles. En vous remerciant de l’attention que vous porterez à cette lettre, je vous prie d’agréer, Madame la Gouverneure Générale, l’expression de ma très haute considération. Christophe Deloire
Secrétaire général de Reporters sans frontières
Publié le
Updated on
20.01.2016