Reporters sans frontières vivement préoccupée par les déclarations du futur ministre de l'Intérieur et de la Justice sur le rétablissement de l'état de siège

Reporters sans frontières est vivement préoccupée par les déclarations faites au quotidien El Tiempo par Fernando Londoño, futur ministre de l'Intérieur et de la Justice du président élu Alvaro Uribe Vélez. Dans une interview publiée le 21 juin 2002 par le quotidien colombien, M. Londoño s'est prononcé pour le rétablissement de l'état de siège en Colombie tel qu'il était défini dans la Constitution de 1886. Cette formule permettrait au gouvernement de restreindre la liberté de la presse et la liberté de circulation afin de "garantir l'ordre public". Reporters sans frontières s'est prononcée contre de telles restrictions. "Les propositions de M. Londoño laissent augurer du pire en matière de respect de la liberté de la presse, au lendemain du 7 août prochain, lorsqu' entrera en fonction l'administration du président Alvaro Uribe", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. "La mise en application des propositions du futur ministre de l'Intérieur et de la Justice fera du gouvernement colombien un nouvel ennemi de la liberté de la presse dans un pays qui, malheureusement, n'en manquait pas", a ajouté M. Ménard. Ce dernier a rappelé le caractère inaliénable des droits de l'homme en réponse aux explications de M. Londoño selon lesquelles "il y a beaucoup de droits qui doivent céder la place lors d'un moment de crise aussi aiguë qui met en danger les institutions. Vous ne pouvez pas dire : je veux l'état de siège, mais ne touchez pas aux droits fondamentaux." L'organisation a également dénoncé le caractère "pervers" des arguments utilisés par M. Londoño qui a expliqué devoir "toucher (aux droits fondamentaux) précisément pour les sauver". Il a ajouté que "le journalisme doit comprendre qu'il aura des limites comme il en a eues dans n'importe quel endroit du monde". "En Colombie, pas plus qu'aux Etats-Unis, où le gouvernement est engagé dans la lutte contre le terrorisme international, la légitime défense de la sécurité des citoyens et de leurs droits ne peut justifier la limitation de ces droits", a expliqué l'organisation. Enfin, M. Londoño s'est dit partisan de l'élimination de tout contrôle de l'instauration de l'état d'exception par la Cour constitutionnelle. Il a précisé: "Il faudra dire (à la Cour constitutionnelle) que c'est un acte politique qui est de la compétence du Président." Reporters sans frontières est préoccupée par ces prises de position. "La Cour constitutionnelle comme la liberté de la presse sont des contre-pouvoirs indispensables à toute démocratie", a rappelé M. Ménard. "Le fait que M. Uribe Vélez ait été élu dès le premier tour ne doit pas donner le sentiment à son administration qu'elle dispose de tous les pouvoirs", a conclu l'organisation. Alvaro Uribe Vélez a été élu à la présidence de la République le 26 mai 2002. Il entrera en fonctions le 7 août prochain. Il a désigné Fernando Londoño comme son futur ministre de l'Intérieur et de la Justice.
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Updated on 20.01.2016